dimanche 25 avril 2010

Journal d'Hirondelle de Amélie Nothomb

Un chagrin d‘amour fait toujours mal. Et le meilleur moyen d’échapper à la douleur est encore d’annihiler ses propres sens. Cette solution, toute simple, le narrateur l’a choisie.  Mais elle lui devient forcément pesante au fil du temps. Il découvre alors que la seule façon de réveiller ses sensations endormies est d’être confronté à des émotions nouvelles. Progressivement, il réussit à ranimer certains de ses sens. Mais un problème de taille persiste cependant : bien que le manque sexuel se fasse ressentir de plus en plus, rien ne parvient plus à le troubler. Licencié de son travail de coursier, il se fait recruter comme tueur à gage. Dès sa première mission il en ressent un émoi sexuel intense. C’est la révélation. Peu importe la proie, c’est l’acte qui le comble.  Mais c’était sans compter la découverte du journal intime d’une de ses dernières victimes. Serait-il en train de tomber réellement amoureux, après sa mort, de celle qu’il surnomme Hirondelle ?...
Rédigé à la première personne du singulier, le récit invite le lecteur à pénétrer directement dans les pensées les plus intimes du narrateur. Cet être est sans aucun doute fou, mais le cheminement de sa pensée n’en est pas moins d’une logique implacable. Les phrases sont courtes et incisives, et la façon d’aborder les faits est très crue. L’auteur aime jouer avec le vocabulaire très riche de la langue française et les tournures de phrases inattendues. Ce choix rédactionnel, qui pourrait rendre le texte lourd et peu engageant, est maîtrisé à la perfection à la plus grande joie du lecteur. L’auteur parvient également à faire sourire malgré un déluge de scènes plus horribles et dérangeantes les unes que les autres.
Une fois de plus, l’imagination fertile d’Amélie Nothomb offre là une histoire complètement décalée. Jamais déçue jusqu’à maintenant par ses écrits,  j’ai de nouveau apprécié son style inimitable. Ce livre est sans aucun doute un clin d’œil à notre société blasée qui, de fait, impose en permanence la surenchère. Mais c’est aussi une source d’espoir lorsque l’on voit ce héros, capable du pire, s’émouvoir du journal intime d’une jeune fille.

Sophie HERAULT

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