Charlie Gordon, la trentaine, est déficient intellectuel. Il travaille dans une boulangerie où il est employé pour réaliser les basses besognes. Il évolue dans un univers où il a l’impression d’avoir de nombreux amis qui rient beaucoup avec lui, sans se rendre compte qu’ils rient de lui. Jusqu’au jour où une opération miraculeuse, déjà testée avec brio sur une souris de laboratoire, Algernon, lui permet de devenir de plus en plus intelligent et d’atteindre un QI de 185. Il découvre alors l’amour avec Alice Kinnian, sa formatrice au cours d’adultes attardés où il se rendait auparavant pour apprendre à lire et à écrire. Mais un beau matin, Algernon régresse…
Le livre débute par un très bel extrait de « La République » de Platon qui décrit le trouble qui peut saisir l’âme quand elle passe de l’obscurité à la lumière, ou inversement, de la lumière à l’obscurité. C’est exactement ce qui va arriver à Charlie Gordon, le passage de l’ignorance et de l’arriération mentale vers l’état le plus extrême de connaissances et d’intelligence, puis la phase de déclin.
L’auteur fait usage d’un procédé stylistique habile pour retracer ces deux phases : il expose les plus intimes pensées de Charlie en le faisant parler lui-même, sous forme de comptes-rendus que les psychochirurgiens lui demandent afin de suivre sa progression. Au départ, l’orthographe est maladroite, hésitante, la syntaxe et le vocabulaire simples, avec beaucoup d’erreurs. Les dix premières pages en sont rendues d’autant plus difficiles à lire, ce qui confère au roman, au départ, un caractère un peu abrupt. Mais cet effet s’estompe rapidement, au fur et à mesure que Charlie gagne en intelligence : le vocabulaire s’étoffe et s’enrichit, les fautes d’orthographe disparaissent, le propos et les réflexions sont soutenues. Un bel exercice de style en somme !
Ce roman de science-fiction (science-fiction, non pas au sens de grands voyages intergalactiques ou présence d’extra-terrestres, mais parce que l’opération qui permet de voir croître l’intelligence n’existe pas) aborde un grand débat qui anime le monde de la psychologie, concernant l’intelligence et le QI : peut-on guérir d’un handicap intellectuel, peut-on gagner en QI, en « musclant » son intelligence, à force d’entraînement et en étant un peu aidé par une opération miraculeuse ? C’était là tout l’espoir de la mère de Charlie qui a passé une bonne partie de sa vie à consulter des charlatans en tous genres, dans l’espoir de ramener son fils vers la normalité. Quand elle a compris que son espoir était vain, elle a alors décidé de s’en débarrasser, puis de l’oublier.
La scène des retrouvailles de Charlie avec sa mère – tant attendue et tant redoutée – est incontournable et s’avère très émouvante. L’auteur – qui est chercheur universitaire en psychologie – analyse avec finesse l’évolution de l’état psychique – tant intellectuel qu’émotionnel – de Charlie : si le jeune homme voit son intelligence croître considérablement, le côté affectif ne suit pas, Charlie restant marqué par son enfance, ses blessures narcissiques, et sa relation pathologique avec sa mère.
Daniel Keyes délivre un message à travers son roman : le surcroît d’intelligence peut transformer de manière irréversible la personnalité, pas forcément de façon positive : le Charlie d’avant l’opération était peut-être déficient intellectuel, mais il avait une grande bonté d’âme, qu’il a perdue après l’opération. J’ai ressenti beaucoup d’attachement pour Charlie et ai été très touchée par sa destinée.
J’ai vraiment aimé cette belle fable, à la fois psychologique mais aussi philosophique, en témoigne l’incipit dédié à un extrait d’œuvre de Platon. Une fable profonde, mais éprouvante, intellectuellement et émotionnellement. Une fable qui nous fait réfléchir sur le sens de la différence, de l’altérité, du handicap (soit par arriération, soit par trop grand génie).
Christelle GATE
Le livre débute par un très bel extrait de « La République » de Platon qui décrit le trouble qui peut saisir l’âme quand elle passe de l’obscurité à la lumière, ou inversement, de la lumière à l’obscurité. C’est exactement ce qui va arriver à Charlie Gordon, le passage de l’ignorance et de l’arriération mentale vers l’état le plus extrême de connaissances et d’intelligence, puis la phase de déclin.
L’auteur fait usage d’un procédé stylistique habile pour retracer ces deux phases : il expose les plus intimes pensées de Charlie en le faisant parler lui-même, sous forme de comptes-rendus que les psychochirurgiens lui demandent afin de suivre sa progression. Au départ, l’orthographe est maladroite, hésitante, la syntaxe et le vocabulaire simples, avec beaucoup d’erreurs. Les dix premières pages en sont rendues d’autant plus difficiles à lire, ce qui confère au roman, au départ, un caractère un peu abrupt. Mais cet effet s’estompe rapidement, au fur et à mesure que Charlie gagne en intelligence : le vocabulaire s’étoffe et s’enrichit, les fautes d’orthographe disparaissent, le propos et les réflexions sont soutenues. Un bel exercice de style en somme !
Ce roman de science-fiction (science-fiction, non pas au sens de grands voyages intergalactiques ou présence d’extra-terrestres, mais parce que l’opération qui permet de voir croître l’intelligence n’existe pas) aborde un grand débat qui anime le monde de la psychologie, concernant l’intelligence et le QI : peut-on guérir d’un handicap intellectuel, peut-on gagner en QI, en « musclant » son intelligence, à force d’entraînement et en étant un peu aidé par une opération miraculeuse ? C’était là tout l’espoir de la mère de Charlie qui a passé une bonne partie de sa vie à consulter des charlatans en tous genres, dans l’espoir de ramener son fils vers la normalité. Quand elle a compris que son espoir était vain, elle a alors décidé de s’en débarrasser, puis de l’oublier.
La scène des retrouvailles de Charlie avec sa mère – tant attendue et tant redoutée – est incontournable et s’avère très émouvante. L’auteur – qui est chercheur universitaire en psychologie – analyse avec finesse l’évolution de l’état psychique – tant intellectuel qu’émotionnel – de Charlie : si le jeune homme voit son intelligence croître considérablement, le côté affectif ne suit pas, Charlie restant marqué par son enfance, ses blessures narcissiques, et sa relation pathologique avec sa mère.
Daniel Keyes délivre un message à travers son roman : le surcroît d’intelligence peut transformer de manière irréversible la personnalité, pas forcément de façon positive : le Charlie d’avant l’opération était peut-être déficient intellectuel, mais il avait une grande bonté d’âme, qu’il a perdue après l’opération. J’ai ressenti beaucoup d’attachement pour Charlie et ai été très touchée par sa destinée.
J’ai vraiment aimé cette belle fable, à la fois psychologique mais aussi philosophique, en témoigne l’incipit dédié à un extrait d’œuvre de Platon. Une fable profonde, mais éprouvante, intellectuellement et émotionnellement. Une fable qui nous fait réfléchir sur le sens de la différence, de l’altérité, du handicap (soit par arriération, soit par trop grand génie).
Christelle GATE
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