Pour Hegel, "La musique doit soulever l'âme au-dessus du sentiment dans lequel elle est plongée". A l'inverse, selon une étude, la musique symphonique stimulerait la lactation des vaches... De la confrontation de ces deux éléments, Alessandro Baricco tire un essai où il tente de déterminer la place de la musique classique dans la société contemporaine. S'interrogeant d'abord sur la musique classique souvent considérée comme "musique cultivée", il essaie de comprendre l'origine de cette idée de suprématie, et enchaîne sur le thème de l'interprétation, par laquelle selon lui la musique doit être réinventée pour s'inscrire dans l'époque contemporaine. S'ensuit un réquisitoire contre la Nouvelle musique, dite d'avant-garde, qui serait déconnectée du public et de la société, et Baricco en explique les raisons. Enfin, si la Nouvelle Musique s'est fourfoyée, il tente, à travers les oeuvres de Puccini et Mahler, d'analyser les autres voies possibles pour que la musique retrouve tout son sens, en s'ancrant dans la modernité.
Il s'agit d'un court essai, rapide à lire, rempli de formules chocs qui tiennent parfois de l'aphorisme. C'est très bien écrit, et la construction est claire : une introduction définissant les termes utilisés, et quatre chapitres abordant chacun une thématique précise. La forme est un peu scolaire, mais le fond est iconoclaste, volontiers provocateur et très affirmatif. Selon qu'on adhère ou pas aux thèses de l'auteur, on passera au fil des pages de la surprise à l'irritation, de l'indignation au scepticisme, du saisissement à l'approbation. Très érudit, ce texte est pourtant fluide, facile à comprendre, et bien que catégorique dans ses conclusions, il est facile de le mettre à distance pour y confronter ou y adjoindre sa propre réflexion.
J'ai beaucoup apprécié ce livre, et en particulier l'analyse de l'oeuvre de Mahler, déconcertante car osée, mais qui fait sens au regard de ma perception personnelle. Par contre, j'ai été moins convaincue par certaines idées de l'auteur. Mais il dit lui-même qu'il vise davantage à formuler les questions qu'à apporter les réponses. En ce sens, c'est une réussite. Mes idées, mes certitudes ont été bousculées par cet essai brillant et provocateur, qui suscite la réflexion, tant sur les thèmes abordés que sur d'autres questions - comme la musique populaire (pop, rock, etc.), délaissée par l'auteur, contrairement à ce que laisse entendre la quatrième de couverture. Je le regrette un peu, mais cet ouvrage reste un vrai plaisir de lecture, très stimulant.
Fanny LOMBARD
vendredi 18 septembre 2009
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire