jeudi 29 mai 2008

Petite vie de Bernadette de René Laurentin

Bernadette une petite bergère issue d’une famille pauvre mais très unie, vit avec ses parents et ses sept frères et sœurs près de Lourdes, au 19e siècle. A l’âge de 14ans, un jour alors qu’elle va chercher du bois dans la campagne, avec des amies, elle aperçoit une forme blanche dans le rocher de la grotte de Massabielle, qu’elle appellera « Aquero » ce qui veut dire « la chose » en patois local.
Bernadette sait à peine lire et écrire, mais elle est élevée dans la chrétienté. Depuis ce jour, elle est toujours très attirée par « Aquero » et se rend souvent à la grotte. Elle veut garder le secret sur ces apparitions mais ses amies en parlent et peu à peu la rumeur s’étend, grossit et toute la région est au courant. Bon nombre de curieux, de croyants, d’incrédules, viennent sur place, ne laissant plus Bernadette tranquille. Peu à peu elle se retrouve dans un engrenage qu’elle ne désirait pas et ne peut plus l’arrêter. Pour la protéger, on l’envoie dans un couvent à Nevers. Bien qu’elle soit de santé fragile, elle reste toujours joyeuse et espiègle et cette célébrité l’ennuie énormément car elle est restée simple. Elle est parfois rebelle, ce qui n’est pas toujours du goût des religieuses. On découvre là, la dureté de certains couvents. Même dans celui-ci, où elle est aide-soignante, encore pas mal d’intrigues se nouent autour d’elle. Souvent malade, elle meurt à l’âge de 35 ans, heureuse de rejoindre « Mon Jésus » comme elle dit. Elle n’a pas eu d’autres apparitions depuis Lourdes. Ce livre n’est pas un roman, c’est une sorte de journal que l’auteur a créé avec des témoignages de l’époque. Beaucoup ne croient pas à ces apparitions. Même certains prêtres et religieuses, la croient folle. Mais après bien des concertations et des analyses, ces apparitions seront reconnues comme surnaturelles, car un jour « Aquero » a dit à Bernadette « Je suis l’immaculée conception ». Un mot que ne peut pas avoir inventé la jeune fille, qui était très peu instruite. J’ai bien aimé ce livre car il retrace la vie des gens pauvres du 19e siècle et aussi celle des couvents de cette époque, à travers principalement la vie de Bernadette. J’ai été surprise par la vie simple de cette jeune fille, entièrement dévouée aux autres pour respecter la demande de Dieu. Elle le fait d’une façon toujours simple, toute naturelle. Mais j’ai été aussi surprise, par son coté espiègle, joyeux, qui ne me semble pas compatible avec une vie de religieuse. Par contre étant construit sous forme de journal avec documents d’époque, il manque un peu de liaison entre les différents chapitres.
Hélène SALVETAT

lundi 26 mai 2008

Elémentaire ma chère Sarah de Jô Soares

En mai 1886 la célèbre actrice Sarah Bernard se trouve en tournée théâtrale à Rio de Janeiro sur invitation de l’empereur Pedro II. Celui-ci lui confie le désespoir d’une de ses très bonnes amies qui s’est fait volé le magnifique violon Stradivarius qu’il lui avait offert. Aussitôt l’actrice pense à son ami londonien Sherlock Holmes, pour enquêter en toute discrétion sur ce vol. Mais bien vite, la discrétion n’est plus à l’ordre du jour d’autant plus que d’abominables meurtres sont commis sur des femmes dans les rues, la nuit. Il semblerait bien d’ailleurs que les deux affaires soient liées…
Comment parler de ce livre sans en évoquer la fin ? C’est la première chose qui m’est venue à l’esprit une fois terminée la lecture de ce roman…Parce qu’il faut bien que je l’avoue, jusqu’aux dernières pages, j’avais trouvé ce roman bien écrit, facile à lire, agréable, avec ce qu’il faut d’humour, de dérision, de suspens, mais bon, pas de quoi s’extasier. Et puis le dénouement final m’a transporté d’admiration pour l’auteur, d’avoir pu imaginer une telle chute à cette histoire originale et de donner ainsi une toute autre dimension au livre!
Il fallait en effet y penser, à la rencontre de ces deux stars, Sherlock Holmes et Sarah Bernard au Brésil! Mais ce n’est pas tout à fait le Sherlock Homes que nous connaissons à travers Conan Doyle, peut-être parce que ses histoires n’ont pas encore été racontée par ce cher Watson … Dans ce roman que l’on peut considérer comme une parodie, nous avons des personnages à la limite de la caricature : Les grands de Rio sont regroupés dans « la confrérie des fainéants » (tout un programme !), Sarah Bernard parle quasiment toujours en alexandrins, Watson se retrouve souvent dans des situations impossibles et complètement loufoques et Sherlock Holmes nous est présenté comme un personnage vaniteux, imbu de sa personne, qui traite son Watson en valet, voire en demeuré…Ses célèbres déductions sont toutes plus erronées les unes que les autres. Est-ce la faute à la chaleur, à la nourriture épicée, à l’émoi amoureux qu’il éprouve envers une jeune et belle métisse ou encore à la consommation importante de cannabis ? Toujours est-il que le brouillard dans lequel il se trouve ne l’aide pas beaucoup à résoudre cette énigme. Pourtant le coupable prend un malin plaisir à distiller des indices après ses crimes absolument atroces…Il est d’ailleurs à noter que les passages relatifs aux meurtres sont particulièrement épouvantables et lourds de menaces pour l’avenir tandis que tout ce qui se réfère à la résolution de l’enquête est léger et plein de dérision. Ce contraste est saisissant mais logique, voire évident une fois que l’on sait la fin. Tout ceci fait donc de roman un livre très plaisant à lire. Nicole VOUGNY

vendredi 23 mai 2008

Le jeûne et le festin d'Anita Desaï

Nous sommes en Inde. A 40 ans, Uma n'est pas mariée. Pas vraiment jolie et plutôt sotte, on ne lui a jamais trouvé d'époux. Elle vit donc avec ses parents, à qui elle tient plus ou moins lieu de bonne à tout faire, dans une atmosphère étouffante. Vieille fille, elle trouve une maigre consolation dans sa collection de cartes de Noël et ses activités religieuses. Sa jeune et jolie soeur, Aruna, courtisée par tous les bons partis, s'est mariée et a déménagé en ville. Quant à son frère, Arun, fils adoré porteurs de tous les espoirs des parents, il poursuit des études aux Etats-Unis. Hébergé chez les Patton, il y découvre un mode de vie bien différent : la mère passe son temps à acheter des aliments que personne ne consomme, la fille traduit son mal-être par de violentes crises de boulimie, et chacun, au final, semble vivre sans se soucier des autres... Ce roman est divisé en deux parties. La première se déroule en Inde et, à travers le regard et les souvenirs d'Uma, nous montre la vie et l'histoire d'une famille indienne, plutôt ouverte sur l'occident, mais néanmoins ancrée dans une culture et un mode de pensée figé dans la tradition, entre mariages arrangés et adoration du fils unique. La cellule familiale, étouffante et autoritaire, est un univers de violence et de frustrations, générateur d'angoisses. Dans la seconde partie, plus courte, nous retrouvons Arun, le fils chéri, aux Etats-Unis. Il loge chez les Patton, famille moyenne américaine. Cette partie du récit adopte le point de vue d'Arun, et c'est à travers son regard que nous découvrons une société américaine, qui sous des dehors plus libres, se révèle en proie à un individualisme et un consumérisme tout aussi anxiogènes. J'ai apprécié ce livre. Les flash-backs du début m'ont un peu déconcertée car ils "cassent" le rythme du récit, mais ils permettent de mieux comprendre ce qui se joue au sein de la famille d'Uma et de prendre la mesure d'une conception des choses qui, culturellement, nous est étrangère. Au-delà des personnages, auxquels je ne me suis pas vraiment attachée, c'est l'opposition entre les deux sociétés que ce roman met en relief. Le trait m'a parfois semblé un peu caricatural, mais le propos reste intéressant. Néanmoins, ce livre m'a laissé un petit goût d'inachevé. Dommage que la seconde partie, moins fouillée que la première, manque un peu de finesse... Fanny LOMBARD

jeudi 22 mai 2008

La cité de l'horizon d'Anton Gill

Anton Gill nous entraîne dans les aventures de Huy, scribe au temps d’Akhenaton, déchu après la mort de ce dernier et qui doit refaire sa vie sous Toutankhamon. Ainsi on découvre l’opprobre subie par ceux qui soutenaient Akhenaton, premier et unique pharaon monothéiste. Huy se trouve dans l’impossibilité de poursuivre sa carrière de scribe. Il va donc devoir coûte que coûte refaire sa vie, car, en plus, il a divorcé de sa femme qui a la garde de leur fils unique. Mais au moment où il commence à perdre tout espoir en l’avenir, Huy rencontre Amotjou, un ami d’enfance qui l’emmène sur son navire en direction du nord de l’Egypte, où se situe la nouvelle capitale du pharaon.
Celui-ci connaît la situation délicate dans laquelle se trouve Huy, il lui propose donc de travailler pour lui, pas en temps que scribe, mais comme détective, afin de lui permettre de démanteler un réseau de trafiquants d’objets volés dans les tombeaux des riches familles égyptiennes. Mais, l’aventure s’annonce délicate car lors de son arrivée à Thèbes, Huy s’aperçoit vite que la disgrâce dont il est victime depuis la chute de l’empire d’Akhenaton est déjà connue de tous. Ce roman nous permet d’imaginer les temps de troubles qui secouent l’Egypte à cette période. On retrouve également tout un mode de vie que l’on connaît mal et cela est très dépaysant… Pourtant, eh oui pourtant, ce livre n’est pas une franche réussite. Je m’explique : certes l’Egypte antique m’a toujours intéressé et retrouver cet univers m’a plu, mais il y a quand même beaucoup de maladresses d’écriture (ou de traduction). En effet, les dialogues sont assez surréalistes : j’ai eu beaucoup de mal à imaginer les protagonistes égyptiens de l’époque s’exprimer comme nous le dépeint Anton Gill. Ensuite, oui on est dans l’Egypte ancienne, mais heureusement que les termes vestimentaires et religieux utilisés par l’auteur nous le rappellent, car pour les descriptions des paysages et des us et coutumes de la population c’est maigre et superficiel. Et enfin pour clore le tout : Anton Gill n’est pas Conan Doyle, et cela se ressent vraiment dans la manière dont il suit l’enquête de Huy. En fin de roman, il y a bien une confrontation avec les coupables et l’explication du comment Huy a résolu l’énigme mais alors quelle déception car on ne pouvait vraiment pas trouver le coupable par nous même ! Eh oui, tous les indices déterminants, nous apprenons que Huy les a découverts lors de visites aux archives ou lors de ses rencontres avec tel ou tel personnage, mais tous ces événements, nous ne les avons pas suivis dans le livre. Les déductions et les révélations de Huy sont donc aussi improbables et mystérieuses pour les accusés que pour le lecteur. Si comme moi, vous êtes fan de l’Egypte antique, n’entrez pas dans « La cité de l’horizon » ou attendez vous à de grandes déconvenues. Peut-être faut-il préférer les tomes suivants, où l’auteur aura (j’espère) corrigé les maladresses de ce premier roman.
Florent OLLIVIER

mardi 20 mai 2008

Le rocher aux corbeaux de Peter Robinson

A Swainsdale, petite ville de campagne du Yorkshire, se cotoient trois catégories d’individus : les touristes, qui affluent chaque week-end à la recherche d’un coin de verdure ; les néo-ruraux, qui ont fuit la ville et son stress pour le calme de la campagne anglaise ; et enfin, les gens du cru, qui, pour les uns ne quitteraient pour rien au monde cette terre qui a vu naître leurs ancêtres, et pour les autres, n’ont qu’une idée en tête, fuir ce « trou-à-rats » où rien ne se passe. Harry Steadman, ancien professeur d'université, avait réussit le tour de force, tout en faisant partie de cette deuxième catégorie, de se faire apprécier et respecter par la population locale. Passionné d'archéologie, habitué du pub « The Bridge » où il retrouvait ses amis Barker, l’écrivain, Barnes, le médecin, et Hackett, le chef d’entreprise, Steadman était un fervent défenseur du passé historique de Swainsdale. Quand son corps est retrouvé, le long d’un vieux mur de pierres sèches, au détour d’un chemin de campagne, tout le monde à Swainsdale est sidéré : « Qui a bien pu tuer un homme si bon ? » Pour l'inspecteur divisionnaire Banks, qui lui aussi a quitté Londres pour échapper à son climat de violence, les suspects ne manquent pas. Petit à petit, Banks découvre que le passé de Steadman n’est pas aussi tranquille qu’il n’y paraît… Une enquête à l’ancienne, sans expert, autopsie et traque par ordinateur. Patiemment, par recoupements, l’inspecteur Banks analyse et dissèque les alibis des principaux protagonistes pour nous entraîner progressivement vers le dénouement final. Peter Robinson, dans ce second épisode des enquêtes de l’inspecteur Banks, nous dépeint un homme serein, bien dans sa peau et sûr de ses choix, qu’ils soient professionnels ou familiaux. Pour autant, ce calme apparent contraste fortement avec la plupart de ses confrères littéraires : bien moins tourmenté que l’inspecteur Rébus de l’Ecossais Rankin, moins désabusé que le commissaire Wallander du Suédois Mankell ou moins troublé par des conflits familiaux que l’inspecteur Erlandur de l’Islandais Indridasson, l’inspecteur Banks n’en demeure pas moins un personnage attachant au caractère bien trempé. Bien qu’ayant de très loin préféré d’autres romans de Robinson (« Beau monstre » et surtout « Saison sèche », entres autres), j’ai trouvé ce livre fort plaisant dans un style sans prétention. Un bon polar à l’Anglaise en sorte ! Pierre LUCAS

lundi 19 mai 2008

La petite fille au manteau rouge de Roma Ligocka

Lors d’une projection à Cracovie de la « liste de Schindler », Roma Ligocka se rend compte qu’elle a été filmée petite : La petite fille au manteau rouge qui traverse la rue, c’est elle. C’est un cataclysme pour elle, ou plutôt l’occasion de se pencher sur son passé, sur son enfance. Née en 1941, elle a connu l’occupation. Dans ce livre, Roma raconte la fuite du ghetto, la peur des Allemands, la survivance, les cachettes et les ruses pour ne pas se faire prendre. Toute sa vie sera marquée par les souvenirs de la guerre. Même adulte, Roma a peur : peur par exemple de ce médecin, ancien soldat allemand. Pourtant, Roma aura une force de vivre tout au long de son existence. Mariée à Wieslaw (issu d’une vieille famille de noblesse) elle le quittera pour ne plus le voir ivre. Gravement malade, elle s’en sortira. Elle choisit pour son avenir le beau monde c’est-à-dire le monde de l’art. Roma trouvera enfin le bonheur en la personne de Jan, un metteur en scène de pièces de théâtre. La vie certes, est difficile en raison du manque d’argent et de cette interminable peur du passé. Devenue décoratrice de théâtre et peintre, Roma restera toujours obnubilée par ses souvenirs de guerre et ne pourra jamais pleinement profiter de la vie. Ce roman est écrit avec des mots simples : on sent très bien cette peur et cette quête incessante de fuir l’ennemi. Au fil des pages, nous ressentons de plus en plus les sentiments de l’enfant et cette ambiguïté : le désir de se cacher et celui de vivre au-dehors, de voir ce « jardin secret ». Roma adore écouter sa mère qui raconte sa vie d’antan. Voilà un roman qui se lit aisément, un roman nécessaire pour graver la Mémoire de la guerre. C’est le récit d’une guerre vécue par une enfant, un être qui n’a pas encore les facultés de discernement. Roma décrit cette guerre mondiale, mais aussi les conséquences sur le mental, sur l’avenir. Les mots justes sont employés pour faire revivre une vie handicapée par les souvenirs de ce grand conflit. Christine BELLOT

vendredi 16 mai 2008

La conjuration du troisième ciel de Leoni Giulio

Florence, Juin 1300. Un crime macabre a été commis dans l’église San Giuda. La victime est un maître artisan mosaïste qui y travaillait sur une fresque. Devant les particularités du cadavre, Dante Aligheri, alors un des plus hauts magistrats de la ville, est chargé de découvrir le coupable. Très vite ses soupçons se portent sur une société, la confrérie du troisième ciel, composée de sages, tous récemment arrivés de Rome et ayant des idées quelque peu séditieuses… Tout le monde connaît au moins de nom Dante Aligheri, le célèbre poète auteur, entre autre, de la Divine Comédie. Mais ce que l’on sait beaucoup moins c’est qu’il fut durant environ deux ans l’un des plus hauts responsables de la ville de Florence. C’est pendant cette période que l’auteur a choisi de le faire évoluer et nous faire découvrir sa personnalité à travers la résolution d’un crime, période qui se situe aussi après qu’il eut écrit les fameux poèmes pour Béatrice, son grand amour platonique et avant qu’il n’écrive la divine comédie. La précision est importante puisque dans le récit, il est très souvent fait référence à ses écrits passés et à venir notamment l’image qu’il se fait de l’enfer en voyant vivre ses concitoyens. Je ne sais pas si Dante était vraiment tel qu’il nous est présenté dans ce livre mais je l’ai trouvé particulièrement détestable. Imbu de lui-même et de sa charge, méprisant, intransigeant, belliqueux, vaniteux… Je n’ai rien trouvé qui vienne me le rendre sympathique… Du coup, je n’ai pas aimé ce livre. Et pas seulement à cause du personnage mais aussi parce que l’écriture est lente, lourde et que la narration manque de rythme. Le récit est étouffé par des considérations philosophiques, un peu trop nombreuses à mon goût, surtout pour une ignare en la matière telle que je suis, ce qui nuit considérablement à l’intrigue. De plus, la fin tombe comme un cheveu sur la soupe, sans qu’on ait vraiment compris le cheminement de Dante pour arriver à cette conclusion (ou alors j’ai tellement décroché que je n’ai rien compris ?). Il est rare que je m’ennuie lors d’une lecture mais cela a cependant été le cas ici, au point de ne même pas avoir envie de découvrir le coupable ! Pourtant les thèmes abordés étaient intéressants : la vie quotidienne à Florence au début du XIVe siècle, les luttes pour le pouvoir entre les différentes familles de la ville et le pape, le climat social et politique, les alchimistes, les sociétés secrètes, les complots... Il y avait matière à nous faire vibrer ! Mais malgré cela, à aucun moment je n’ai adhéré à l’histoire…Je ne sais pas si le deuxième volume de cette série est plus réussi mais je ne tenterais certainement pas l’expérience…
Nicole VOUGNY

jeudi 15 mai 2008

Mademoiselle de la Ferté de Pierre Benoit

« Où est l’ombre ? Où est la blancheur ? » .
Ces mots par lesquels Pierre Benoît introduit son roman «Mademoiselle de la Ferté » peuvent caractériser tout le mystère qui plane sur l’œuvre et son héroïne. Anne, née au 19ème siècle dans un milieu aisé de Dax, avait tout pour jouir d’une vie heureuse et favorisée. Mais des évènements familiaux, puis sentimentaux, douloureux la transformeront en une sorte de recluse au milieu des landes et des lacs.
L’arrivée d’une nouvelle voisine déstabilisera son austère équilibre, l’obligeant à nouer des relations ambiguës liées à son passé. Froide vengeance ou chaleur humaine chez un être hautain ? Relation anodine ou sulfureuse ? Jusqu’à la fin, l’histoire nous garde en haleine, nous emportant dans un crescendo d’étonnements et de rebondissements contrastant avec un cadre campagnard très monotone. La conclusion même du suspense laissera planer le doute sur les motivations réelles de l’héroïne et chacun pourra prolonger ses impressions de son avis. " Mademoiselle de la Ferté " est l’un des plus beaux romans de Pierre Benoît. Tout en étant dans la tradition de son style ciselé et rythmé, avec une héroïne (dont le prénom commence par la lettre « A », bien sûr !) au caractère autoritaire et attachant, cette œuvre met plus l’accent sur la profondeur de l’âme humaine que sur un cadre d’aventures tel qu’on peut le trouver dans d’autres œuvres. J’avais commandé ce livre alors que je préparais un court séjour dans les environs de Dax, sachant que Pierre Benoît s’était inspiré pour son cadre de lieux où habitait sa famille. Mais ce n’est pas ce cadre alternant la ville de province et l’étrangeté de la campagne landaise qui m’aura le plus enthousiasmé. La vraie richesse de " Mademoiselle de la Ferté se situe dans la densité de l’analyse des sentiments humains complexes et leur présentation avec un style d’une apparente simplicité mais en fait d’un extrême raffinement. Le rythme de l’histoire et ses rebondissements savamment calculés nous entraînent dans une lecture passionnée à laquelle il est délicieux de s’adonner…
Nicole LETOURNEUR

mercredi 14 mai 2008

Demande à la poussière de John Fante

Nous sommes à la fin des années 30. Arturo Bandini, 20 ans, est venu s'installer à Los Angeles. Il rêve de devenir écrivain. Il a publié une nouvelle dans une modeste revue, mais depuis, incapable d'écrire la moindre ligne, il vit misérablement, dans un hôtel miteux, sans un sou en poche. Il passe son temps à traîner dans les rues, oscillant entre une confiance absolue en son talent d'écrivain et la plus noire auto-dépréciation, entre les rêves d'un futur radieux et une sombre angoisse quant à son avenir... Il rencontre Camilla, une serveuse mexicaine dont il tombe immédiatement amoureux. Mais ces exclus du rêve américain, blessés par la vie, enfermés dans leur orgueil et leurs préjugés, n'ont de cesse de s'affronter, gâchant ce qui pourrait être une belle histoire d'amour...
Au fond, l'histoire en elle-même importe peu car ce roman marque véritablement par son style direct, voire brutal, sans fioriture. C'est ce qui fait la force du livre car on entre en totale empathie avec Bandini, alors qu'il pourrait être détestable. Mais c'est un homme complexe, un paumé magnifique, plein de contradictions, à qui l'on s'attache malgré soi. Et tous les personnages sont à l'avenant, tous minables, mais humains dans cette déchéance si bien décrite par Fante. L'atmosphère glauque des bas-fonds de Los Angeles est magnifiquement bien rendue, et j'ai rarement lu un livre aussi fort, aussi puissant. Je comprends qu'il soit considéré comme un chef d'oeuvre de la littérature américaine. Voilà un roman qui ne correspond pas au style de lecture que j'affectionne habituellement, mais dès les premières lignes, j'ai été happée par le livre, et impossible de m'en détacher ! Arturo Bandini, ce paumé vulgaire et pathétique, que j'aurais pu détester, m'a immédiatement touchée par sa complexité, ses blessures, son caractère à fleur de peau qui perce derrière le masque qu'il affecte, comme pour se protéger de sentiments qu'il a d'ailleurs parfois du mal à exprimer. C'est un roman sombre, étouffant parfois, mais illuminé par un fin sublime. Ce livre, c'est un coup de poing dans le ventre. Je ne peux que vous encourager à le lire : c'est un roman trop beau et trop fort pour que vous risquiez de passer à côté !
Fanny LOMBARD

mardi 13 mai 2008

Mr Murder de Dean Ray Koontz

Martin Stillwater, un écrivain de romans à suspense et de thrillers, file le parfait amour avec son épouse Paige. Leurs deux filles, Emily et Charlotte, aiment profondément leurs parents et sont fascinées par les talents de conteur de leur père. Seulement voilà, Martin a des ennuis de santé, des sortes d’absences pendant lesquelles il lui arrive de n’avoir aucun souvenir de ce qu’il fait à certains moments de la journée. Cela ne serait peut-être pas si grave s’il n’y avait pas ce sosie parfait qui veut prendre sa place, l’accusant même de lui avoir volé sa famille, sa maison, ses amis, son travail. Un sosie qui va d’ailleurs tout mettre en œuvre pour l’assassiner. Ce sera très simple, puisqu’il pense comme Martin et au même moment que lui ! Pour couronner le tout, la police n’a pas l’air convaincue du tout par les prétendues agressions dont l’écrivain se dit être la victime. Comment fera-t-il pour se sortir de situations aussi compliquées quand il n’y a que sa bonne foi qui joue en sa faveur ? Et comment échapper à cet individu qui va tout faire pour prendre sa place ? Voilà les questions que Dean Koontz nous oblige à nous poser pour nous faire passer un moment de lecture inoubliable. Tous les ingrédients d’un excellent thriller sont au rendez-vous : le suspense, l’action, les rebondissements et leur lot de surprises. L’auteur impose son style grâce à une atmosphère très angoissante, et on a vraiment du mal à imaginer comment les Stillwater vont s’en sortir. Il est d’ailleurs toujours aussi difficile que d’habitude de refermer un livre de Dean Koontz une fois la lecture commencée. Il ne tombe jamais dans la facilité, et les enchaînements d’évènements sont cohérents, en plus d’être très inattendus. J’ai beaucoup aimé la petite touche de science-fiction qui est apportée à ce roman que l’on pourrait prendre pour un banal thriller. Une chose est certaine, Dean Koontz, lui, ne l’est pas, banal !!! Laurent ENGLE

vendredi 9 mai 2008

100 idées pour animer un mariage de Pierre Lecarme

Voici un guide précieux pour les futurs mariés s’ils souhaitent que leurs invités profitent et passent une très agréable soirée, et que ces derniers ne conservent que de bons souvenirs de la réception. Ce livre propose des conseils bien utiles de l’animateur professionnel Pierre Lecarme, et regorge aussi d’idées très variées pour mener à bien l’animation d’un mariage, et « un mariage bien animé est un mariage réussi ». L’ouvrage est très bien conçu, il présente un sommaire précis et détaillé annonçant les chapitres principaux et sous-chapitres de telle sorte que l'on puisse feuilleter rapidement et trouver immédiatement les quelques jeux qui peuvent convenir à la situation, qu'ils soient à effectuer debout autour d’un verre, assis autour des tables, ou encore sur la piste de danse... Par ailleurs, un index à la fin du livre permet de localiser efficacement un jeu à partir de mots clés. Grâce à ce guide, j'ai déjà identifié un certain nombre de jeux que j'ai trouvés particulièrement amusants et conviviaux, ceux qui font participer parfois que les mariés, et d’autres fois ces derniers avec leurs joyeux convives. Si un DJ-animateur est prévu tout au long de la soirée (situation idéale), celui-ci est bien entendu le meneur des divertissements et c’est lui qui informe les jeux qui ont déjà été approuvés auparavant par les mariés. Dans le cas contraire, on peut également solliciter un ami qui possède notamment une voix qui porte, une élocution facile, le mot pour rire et enfin du tact. J’ai trouvé certains jeux vraiment comiques, comme par exemple « bébé a faim », « Cendrillon », ou encore « les jambes qui dépassent », au point que je ne pouvais me retenir de sourire en les parcourant dans le RER parisien. En effet, j'imaginais avec délectation la mise en scène de ces jeux le jour de mon mariage (je vous laisse le soin de découvrir en quoi ils consistent). Bien sûr, il ne sera pas possible de réaliser tous les jeux que l’on souhaite en une seule soirée, il serait bon de faire un petit tri au préalable par ordre de préférence.
Dai BUI

Le roi des Aulnes de Michel Tournier

Ce roman qui se déroule de 1938 à 1945 se compose en trois parties : Souvenirs d’enfance, la mobilisation au bord du Rhin et la vie en Allemagne.
Les souvenirs d’Abel Tiffauges au Collège Saint Christophe de Beauvais sont évoqués avec nostalgie surtout quand il se souvient de son ami Nestor, le fils unique du concierge du collège, avec lequel il a fait les quatre cents coups et qui décède le jour où le collège brûle. Durant l’été 1939, Abel, devenu mécano et photographe amateur, est emprisonné pour une histoire de viol mais échappe à la cour d’assisses, car la France se prépare au combat et à besoin de bras. Envoyé à la frontière allemande, il devient colombophile par la force des choses car le réseau de télégraphie a été détruit par l’ennemi. Ensuite il sera fait prisonnier de guerre et transféré en Prusse Orientale pour y travailler dans un village perdu. Après moult remous et diverses rencontres, Abel devient recruteur d’enfants afin de les enrôler dans l’armée allemande et ce jusqu’à l’arrivée des soviétiques. J’ai trouvé ce livre intéressant, bien que parfois des passages traînent en longueur, car il nous raconte l’histoire d’un français, en l’occurrence Abel Tiffauges, pendant la guerre. Les circonstances de l’époque font que de fil en aiguille, Abel se germanise en s’imprégnant de culture teutonique. Mais comment un soldat français a-t-il pu se retrouver à exercer la fonction de recruteur d’enfants pour les écoles nazi ? Par ailleurs une des parties que j’ai le plus appréciée du livre ce sont les souvenirs d’enfance d’Abel, écrits dans un style alerte, vivant et plein d’entrain. Ce roman permet également de voir de l’intérieur la décrépitude de l’Allemagne nazi au fur et à mesure que le temps passe et que la défaite se profile à l’horizon. Il est très important de constater que dans cette histoire les enfants sont une des pièces essentielles du roman puisqu’on les retrouve à l’Ecole de la République à Beauvais ou à Paris mais aussi à l’école nazi en Prusse Orientale et bien malgré eux parfois.
Edouard RODRIGUEZ

mercredi 7 mai 2008

Les demoiselles de Provence de Patrick de Carolis

Raimon Bérenger IV, comte de Provence, a quatre filles : Marguerite, Eléonore, Sancie et Béatrice. C’est le destin de ces jeunes femmes prises dans la tourmente du XIIIème siècle que nous raconte Patrick de Carolis. Toutes les quatre sont destinées à devenir reines mais chacune va mener sa vie différemment : Marguerite écrasée par sa belle-mère ne réussit pas à s’imposer auprès du roi Louis malgré son amour alors qu’Eléonore mène d’une main de fer les rênes du royaume d’Angleterre ; Sancie s’enferme dans ses rêves pour oublier son malheureux mariage et finira par découvrir le « fin amor » alors que Béatrice est prête à tout pour son mari qui la dédaigne totalement.
Il est clair que ce roman est très bien documenté et riche en informations sur le XIIIème siècle. Toutefois, je regrette que l’explication documentaire passe souvent avant la trame romanesque et j’ai, par moments, eu l’impression assez désagréable de lire une biographie plus qu’un roman. L’histoire est menée tambour battant, les personnages affluent et leurs histoires s’entremêlent tellement qu’il est difficile de s’attacher à l’un d’eux en particulier ou de s’impliquer dans les événements racontés, surtout dans la deuxième partie du livre. La complexité des intrigues ainsi que la durée de la narration auraient nécessité un deuxième tome ; les personnages auraient pu être davantage travaillés et l’impression de compte-rendu historique atténuée. Ce roman m’a quelque peu déçue non pas au niveau du contenu, mais plutôt au niveau du style d’écriture et de la manière de raconter.
Delphine LE PERF

mardi 6 mai 2008

Corps et âmes de Maxence Van der Meersch

Doutreval est médecin psychiatre, professeur à la Faculté de médecine d’Angers. Sa femme est morte. Il vit avec ses 3 enfants : Mariette, fille aînée, qui remplace la maman tant sur le plan pratique que sur le plan affectif envers la fratrie et épousera sans doute un médecin, Michel étudiant en médecine et Fabienne, la benjamine qui sera infirmière et fait la fierté de son père. Les voies sont toutes tracées pour ces enfants de médecin de l’entre-deux guerres. Michel, que son père voyait faire carrière et épouser une fille de famille, évolue dans ce milieu avec une sensibilité exacerbée qui le fait s’émouvoir face à une jeune fille tuberculeuse attendrissante, Evelyne, qu’il rencontre à l’hôpital. Il en tombe amoureux, l’épouse et la fait soigner… Maxence Van der Meersch avec sa plume fine et sensible nous fait découvrir la médecine des années 30, les arcanes de son pouvoir, la recherche, les expériences à une époque où seuls résultats, réputation, chaires comptent et où l’être humain ne sert que de support aux ambitions. Il nous décrit précisément la souffrance des malades face à l’impudeur, au manque de dignité avec lesquels ils sont froidement traités par des médecins dont l’unique rêve est la notoriété et le pouvoir. Les misères du peuple, avortements ratés, amygdalectomies à la chaîne, anesthésiants approximatifs, tuberculose, schizophrénies… sont traitées à l’Hôpital de l’Egalité avec les moyens et connaissances de l’époque servant de base à l’expérimentation. Corps et âmes, parce que les médecins consacrent leur vie entière à la médecine pour soigner les corps et âmes de leurs contemporains sans attacher grande importance à ce qui fait un homme, son cœur et sa dignité. C’est une très belle peinture du milieu médical de l’époque.
Carole BRUTIN

lundi 5 mai 2008

Le ciel n'a pas de préférés de Erich Maria Remarque

1949, souvenirs encore prégnants de guerre, de mort, Clerfayt, coureur automobile rend visite à son co-équipier en convalescence dans un sanatorium suisse. Il y fait la connaissance de Liliane, jeune pensionnaire d’origine belge condamnée par une maladie pulmonaire incurable à cette époque. Elle n’a d’expérience de la vie que la guerre, l’exode de son pays natal, la mort de ses parents. De cette rencontre va naître avant tout un besoin de profiter ensemble, parfois chacun de leur côté, de chaque instant de la vie. Ils vont donc partir vivre les soirées parisiennes dans les décors nocturnes de la capitale, la fièvre de l’après-guerre. Elle, dont le temps est compté, se veut libre de toute contrainte. Grâce à l’argent d’un oncle parisien dont elle est seule héritière, Liliane va même jusqu’à faire une petite escapade seule à Venise parce qu’il y a urgence à tout vivre. Lui, de son côté, poursuit ses courses automobiles. Chacun selon son histoire nargue la mort mais leurs sentiments vont évoluer et leur amour constamment menacé va-t-il enfin s’accomplir ? Dans un style romancé en contraste avec son best-seller « A l’ouest rien de nouveau », l’auteur offre au lecteur une histoire d’amour entre deux êtres que tout oppose en apparence. J’ai beaucoup aimé parce que, fidèle à lui-même, E.M. Remarque décrit l’essentiel des émotions avec cependant la petite crainte en cours de lecture que le récit ne tourne au roman à l’eau de rose mais il n’en a rien été. Faites-y donc un petit tour et l’attachement pour ces deux personnages est garanti. Liliane est très surprenante, imprévisible, échappant a Clerfayt comme au lecteur comme si elle-même ne savait que choisir dans le temps qui lui est imparti et pourtant …
Sandrine DEFOSSE

vendredi 2 mai 2008

Le secret des enfants rouges de Claude Izner

27 Mars 1892. Une explosion secoue le quartier de la rue de Clichy. A sa table de travail, un homme couche sur le papier la mission divine qu'il se doit d'accomplir. Quelques temps plus tard, un assassinat en Ecosse et le cambriolage de l'appartement de Kenji Mori à Paris sont perpétrés. Lors de ce cambriolage, les voleurs n'ont emporté qu'une coupe exotique sans grande valeur. Les rapports entre ces trois évènements nous sont dévoilés au cours de ce roman. Le personnage central de ce livre est Victor Legris. Aidé de son père adoptif, Kenji Mori, de Joseph Pignot son commis à la librairie Elzevir sise rue des Saints Pères, il nous entraîne dans le Paris de la fin du XIX siècle. Sur fonds d'attentats terroristes dus aux groupuscules anarchistes de l'époque, Victor Legris se lance dans une enquête où tous les faits s'imbriquent les uns dans les autres. A travers les quartiers et les rues de Paris décrits dans ce roman, nous suivons une certaine évolution de la société parisienne de cette période avec ses quartiers bourgeois et populaires, ses fiacres et ses premières automobiles, son opulence et sa misère. Ce livre s'attache plus particulièrement au milieu des chiffonniers parisiens et au quartier des Enfants-Rouges. Nous y faisons la connaissance de personnages typiques et haut en couleur avec leurs expressions argotiques du Paris miséreux de l'époque. Nous jouons au jeu des "Maléfices" (jeu de rôle de cette période), nous découvrons les théories du chaînon manquant prôné par Ernst Haeckel et Eugène Dubois. Nous croisons la route de Toulouse-Lautrec, Paul Verlaine, Paul Fort et bien d'autres. Je n'avais jamais lu d'ouvrages de Claude Izner (écrivain à quatre mains), mais j'ai été enchantée par cette lecture. L'intrigue policière permet de découvrir une période de l'histoire de Paris que je ne connaissais pas et cela m'a beaucoup plu.
Dominique BLANCHO

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