jeudi 31 décembre 2009

Madrid, Montana de Deirdre McNamer


Madrid, Montana dresse le portrait d’un lieu. Tout commence en hiver 1963 avec l’ouverture d’un nouveau grill-room par un groupe d’investisseurs locaux, trois agriculteurs, un chiropracteur, un banquier et le secrétaire de mairie. L’établissement doit servir de mess aux officiers ; ils sont basés dans la montagne à surveiller les missiles dirigés vers l’ennemi, Khrouchtchev, qui a établi les siens à Cuba. Nous sommes dans l’état du Montana, dans une petite ville reculée, aux pieds des Rocheuses, la guerre froide est arrivée à son paroxysme.
Le temps du roman, le chic et fier restaurant aura vécu. Avec lui disparaissent les illusions d’une fille mère, les rêves d’une serveuse et les interrogations d’une jeune adolescente.
Attentive à la fragilité des êtres, Deirdre McNamer nous fait partager l’atmosphère d’incertitude de cette époque, la difficulté de vivre de personnages fragiles dans une petite ville américaine, leur peine à échapper aux conventions et aux schémas tracés d’avance.
Les femmes sont au cœur de ce roman : il y a une bibliothécaire qui ne mettra pas longtemps à perdre sa place, une femme au foyer qui devient étrangement libre et folle en même temps, une coiffeuse portée sur la bouteille pour supporter sa vie…, toute une pléiade de femmes courageuses et perdues, en perpétuel combat avec la vie. Les hommes sont décrits sans concession, sans complaisance mais sans méchanceté : ils sont vils et ennuyeux, pleins de violence et d’égoïsme, avant tout faibles. Leur union est inévitable et pourtant presque toujours désastreuse.
Le roman est découpé en de nombreux chapitres. Ils nous font passer d’un personnage à un autre sans monotonie. Et même s’il est vrai que trois d’entre eux reviennent plus souvent, c’est bien à une dizaine de personnages en même temps que nous confronte l’auteur. Même si la première personne n’est pas employée, nous partageons une très grande proximité avec chacun d’eux.
Madrid, Montana est le beau premier roman de Deirdre McNamer, un écrivain qui se place dans la droite ligne des écrivains du Montana, rien moins que Jim Harrison, Thomas McGuane et Richard Ford.

Jacky GLOAGEN

Christophe et son oeuf de Carlos Fuentes


Carlos Fuentes écrit avec Christophe et son œuf un livre iconoclaste, une farce moderne qui ridiculise les commémorations internationales de 1992 pour le cinq centième anniversaire de la découverte de l’Amérique.
Le point de départ du roman est l’organisation par le gouvernement mexicain d’un concours bien étrange : l’enfant de sexe masculin qui naîtra très précisément à 0.00 heure le 12 octobre 1992, date anniversaire de la découverte du Nouveau Monde par Christophe Colomb, sera proclamé fils prodigue de la patrie.
Depuis le ventre de sa mère et pendant les neuf mois de la gestation, ce nouveau Christophe Colomb, Christophe Palomar y Fagoaga, nous raconte le Mexique de cette fin du vingtième siècle. La découverte est époustouflante, le portrait est acide et loin des images glacées institutionnelles : le Mexique est un pays de tous les malheurs, pollué, surpeuplé, corrompu, en pleine faillite économique. La satire de la société mexicaine est féroce. L’œuf Christophe nous dresse le portrait de son futur pays à travers la narration des tribulations de ses parents, Angel et Angeles, de leurs amis et de leurs familles. Il est question tout au long du récit de destruction, de viol, d’escroquerie et de mort.
Le livre de Carlos Fuentes est exigeant, sa lecture parfois abrupte est désarçonnante. La verve langagière débridée brasse les cultures et les mythes, l’histoire et les traditions. Le lecteur est parfois pris en défaut, tout le monde ne partage pas l’immense savoir de l’auteur. Le roman fleuve foisonne de jeu sur le langage, clins d’œil délibérés qui rappellent les mots-valises de James Joyce. Bien que difficile, le roman recèle des plaisirs à nuls autres pareils. A la fois étourdissant et époustouflant, le lecteur amoureux des littératures sud américaines ne sera pas déçu par cette œuvre colossale de Carlos Fuentes.

Jacky GLOAGEN

mercredi 30 décembre 2009

No pasarán, le jeu de Christian Lehmann


Trois adolescents visitent un magasin de jeux. Le vendeur est particulièrement troublé par l'insigne nazi arboré par l'un d'eux, Andreas ; il leur offre alors un jeu – l'Expérience Ultime – et leur enjoint d'y jouer au plus vite. Le jeu se révèle très singulier : les trois garçons peuvent accéder au mode multi-joueurs alors que leurs ordinateurs ne sont pas connectés ; de plus, c'est un jeu de guerre particulièrement complexe et réaliste, alors qu'il tient sur une unique disquette. La guerre, la vraie, comme si vous y étiez : le Viêt-Nam, Verdun... Pour Thierry et Éric, leur première expérience est une révélation : bouleversés, ils sont résolus à ne plus y toucher. Andreas par contre adore ça ; il contraint ses anciens amis à l'affronter sur le terrain de la guerre civile espagnole. Avec ses légions nazies, soutenant les fascistes de Franco, il compte bien écraser Thierry et Éric, qui se battent avec les résistants républicains, très inférieurs en nombre et en armement et qui n'ont que leur coeur pour entretenir leur cri de ralliement : "¡ No pasarán !"...
C'est un roman jeunesse, pas très long : Je l'ai dévoré en une soirée. Le scénario est percutant, entièrement dédié au support d'une idée simple parfaitement exprimée : La guerre est une chose violente et horrible et non un jeu, mais il y aura toujours des gens pour la perpétrer. Je connais plusieurs personnes qui l'ont étudié ou fait étudier en classe, ça me semble effectivement parfaitement adapté, car ce livre apporte au lecteur des pistes de réflexions fort intéressantes. A recommander cependant aux enfants déjà assez âgés, car ce livre aborde de manière très réaliste l'enfer de la guerre, et nécessite également quelques connaissances générales en histoire.
L'histoire est racontée en suivant principalement le personnage d'Éric. C'est un héros plutôt attachant, mais dans l'ensemble, les personnages sont malheureusement peu nuancés, qu'ils soient principaux ou secondaires. Ce qui n'est pas bien grave, tant le récit est dynamique et prenant. Même ceux qui ne sont pas amateurs de jeux vidéo pourront se mettre à la place des trois adolescents, plongés en pleine guerre alors qu'ils pensaient à l'origine seulement jouer sur leur ordinateur, et qui mûrissent d'un coup. L'auteur a très bien réalisé l'imbrication entre le virtuel et le réel, on passe de l'un à l'autre sans s'en rendre compte. Il a également ajouté la guerre de Bosnie en toile de fond, que l'on découvre à travers le frère militaire d'Éric et l'une de ses camarades de classe réfugiée, et qui ajoute une dimension supplémentaire à l'ensemble.
Le style est très fluide, avec des phrases simples. Le vocabulaire employé est également simple, très visuel, souvent familier quand il est mis dans la bouche des différents adolescents. Beaucoup de dialogues et quelques passages plus légers aèrent le roman.
Au total, un livre engagé, mais très plaisant à lire.

Marie-Soleil WIENIN

Les Indes noires de Jules Verne


La vieille mine écossaise d’Aberfoyle, riche d’innombrables galeries où la vie s’était organisée, est abandonnée depuis dix ans car toutes les couches exploitables étaient épuisées. Seul Simon Ford, ancien contremaître né au fond de la mine, y habite encore avec sa famille. Il n’a jamais perdu l’espoir de découvrir un nouveau filon et explore sans relâche les galeries en sondant la roche, mètre après mètre.
En cette seconde moitié du XIXe siècle, le charbon est le moteur de l’industrie en plein essor, et les Britanniques désignent l’ensemble de leurs houillères sous le nom imagé d’Indes noires, indiquant ainsi qu’elles contribuent, autant que les colonies, à la prospérité du pays.
Un jour, James Starr, ancien ingénieur de la mine retiré à Édimbourg, reçoit un courrier de Ford l’invitant à un mystérieux rendez-vous pour une communication importante. Les deux hommes ne se sont pas revus depuis dix ans… Quelle nouvelle le vieux contremaître pourrait-il apporter sinon l’espoir d’un nouveau filon ? Ces personnages sympathiques vont être entraînés dans une succession d’aventures et de mésaventures où les péripéties et les rebondissements inattendus abondent.
Les paysages superbes d’Écosse sont peints avec beaucoup d’enthousiasme et de nombreuses références à Walter Scott. Les immenses galeries où vivent les mineurs sont présentées comme une sorte d’Eden souterrain, à l’abri des aléas du climat et où la vie serait presque plus saine qu’à la surface ! Les découvertes techniques de l’époque sont toujours mises en avant et employées au mieux, mais la foi de Jules Verne dans la science et le progrès ne paraît pas sans limite. Il redoute les conséquences d’une aveugle course en avant qui pourrait conduire l’humanité à la catastrophe. Au jeune Harry qui regrette que le globe terrestre ne soit pas uniquement composé de charbon, le sage James Starr répond qu’au contraire la nature a été fort prévoyante : « La terre aurait passé jusqu’au dernier morceau dans les fourneaux des locomotives, des locomobiles, des steamers, des usines à gaz et, certainement, c’est ainsi que notre monde eût fini un beau jour ! »
La vie et le travail dans les mines sont abordés sous un angle plus technique qu’humain qui nous apporte bon nombre d’explications adroitement utilisées pour nourrir l’intrigue. Loin du Germinal de Zola, tout semble aller pour le mieux : les ingénieurs sont de braves gens, les mineurs les apprécient, tous se dévouent sans compter et chacun semble vivre heureux. Cette vision idéalisée, typique de la littérature de jeunesse traditionnelle, peut agacer, tout comme les héros de l’histoire qui, foncièrement bons, francs et courageux, s’apparentent plus à des modèles qu’à des personnages réalistes. Cette vertueuse simplicité a cependant un côté rafraîchissant et le lecteur l’oublie très vite car l’intrigue habilement menée l’entraîne irrésistiblement vers un finale grandiose que certains jugent digne d’un opéra de Wagner.     
Ce roman peu connu de Jules Verne soutient sans faillir la comparaison avec des titres plus célèbres. Il vous transportera dans un univers insolite et vous offrira d’agréables émotions de lecture.

Daniel REYNAUD

mardi 29 décembre 2009

Le rat d'Amérique de Jacques Lanzmann


Après la seconde guerre mondiale, Georges un juif qui a échappé à la shoah émigre en Amérique du Sud. Il part en bateau de Marseille, passe par les villes de Santos, Monteviedeo, Buenos-Aires et rejoint Asuncion au Paraguay où réside une cousine. Celle-ci fait un petit effort pour l’accueillir mais vite fait elle s’en débarrasse car Georges n’a pas d’argent.
Alors Georges va errer dans Asuncion, faire des rencontres peu recommandables, puis traverser à nouveau le continent pour rejoindre Mar Del Plata le Las Vegas argentin, avec son pote Paul. Là, après bien des galères, il passe la frontière chilienne, rejoint Santiago et par la force des choses va devoir travailler dans une mine pour se payer un billet retour en France.
J’ai trouvé ce roman plaisant car il s’agit d’une escapade au cœur de la diversité des peuples et des races d’Amérique Latine. Cela n’empêche pas de retrouver également des rebuts de la société occidentale tels que Paul mais aussi des nazis exilés.
De plus beaucoup des attitudes des différents personnages qui composent le roman sont intéressantes à analyser :
- la cousine de Georges, une juive, qui a fui la shoah mais qui considère les indiennes pour des moins que rien,
- les Français qui fréquentent la Maison de France à Santiago et pour qui la solidarité a un sens que si vous êtes fortuné,
- Paul, les mineurs, les gens des bas-fonds de Santiago,etc.
Les descriptions des paysages traversés par Georges sont très réalistes et j’ai vraiment apprécié son séjour à l’île de Pâques avec un passage concernant l’amour assez hilarant.
Les explications du fonctionnement de la mine sont fortes, passionnantes et instructives même si le petit bémol que j’émettrai concerne la brièveté à mon goût de cette partie du roman.

Edouard RODRIGUEZ

Le transfuge de Richard Wright


Croos Damon, un noir de Chicago, qui ne supporte plus le train- train de sa vie profite d’un accident de métro pour se faire passer pour mort et ainsi fuire femme, enfants, maitresse, mère et collègues de travail.
Avant de partir pour New-York, et alors qu’il est sensé reposer deux mètres sous terre, Cross croise dans un hotel Joe, un ami, qui le reconnaît aussitôt. Alors Cross n’ a plu le choix. Il tue Joe, le jete par la fênetre et direction la gare pour prendre un train pour New-York.
Lors de ce voyage, Cross fait connaissance du District Attorney de New York Ely Houston et de Bob serveur dans le train. Arrivé à New-York  Cross prend l’identité de Lionel Lane qui est mort il y a peu. Lors d’une visite chez Bob, ce-dernier met en rapport Cross avec des membres du Parti Communiste.Alors commence une aventure dans laquelle les meurtres succède aux meurtres et où Lionel est toujours là. De ce fait débute une partie à trois entre le Parti, Lionel et l’Attorney de New York Ely Houston qui réapparait.
Lionel se fera t-il pincé par Houston, le Parti ou s’en sortira t-il s’en accroc ?
Un livre fort intéressant de part ses intrigues : amours, meurtres et politique font un cocktail explosif où l’auteur ne laisse pas au lecteur le temps de s’ennuyer.
Dans un laps de temps très court, puisque Cross ne passe que trois jours à New-York, l’action est quasi permanente et le suspens insoutenable.
Les personnages jouent à la perfection leurs rôles comme dans une piède de théâtre. Un policier Mr Houston qui base son enquête sur l’intuition plus que sur les preuves, des Communistes froids, autoritaires,sans pitié et sans cesse à l’affût de renseignements,des femmes malheureuses en amour ,comme Dot, Gladys et Eva.
J’ai beaucoup apprécié l’esprit d’analyse de Cross qui est capable en un instant de faire le point de la situation et d’en tirer profit.
Par ailleurs l’image que nous renvoie richard Wright de la société américaine des années cinquante est très critique. La ségrégation raciale comme l’activisme des rouges y sont palpable durant tout le livre.
Pour finir, j’ai trouvé le monologue de Cross quand  il evoque sa vision politique forte et très bien construite. Cette vision se résume assez simplement que vous soyez communiste ou capitaliste, elles sont basées sur un socle commun : l’exploitation de l’homme. Ce qui laisse très peu de visibilité pour l’avenir de l’humanité.   

Edoaurd RODRIGUEZ

lundi 28 décembre 2009

L'abbé de Penarbed de Youenn Coic


Après la mort du Pape Jules II (celui qui donnait du travail à Michel-Ange) en 1513 et du cardinal Guibé dont il est le secrétaire particulier, Hamon BARVER s'en revient en Bretagne à bord d'un navire où il embarque à Ostie.Le cercueil d'un chevalier breton mort à la croisade l'accompagne, BARVER l'a trouvé dans les caves du château Saint-Ange à Rome et veut l'enterrer en sa patrie du Léon. Hamon BARBER est le nouveau Père Abbé de Penarbed et du Relecq sans compter moultes prieurés et vicariats. Le reste du récit relate les questions de préséance entre hobereaux et les tensions entre le peuple misérable, susceptible, rebelle et les possédants bretons accrochés à leurs privilèges  ou les seigneurs qui associent leurs intérêts à ceux du Roi de France. Le lecteur découvrira les détails.
A mon humble avis, qui trop embrasse mal étreint, le sujet traité par l'auteur est trop vaste, il ne développe pas assez ses personnages et la construction de son livre est déroutante ou trop originale si l'on est gentil. Certes il y a la documentation historique, mais quel est le message qu'il veut faire passer?Que le peuple a été vampirisé par le clergé et la classe nobiliaire?Que le tempérament mystique du Breton a été manipulé par le clergé romain pour le rendre docile comme un doux agneau? Que toute tentative de rébellion a toujours été noyée dans le sang? Quelle est le fond de la pensée de l'auteur? Ses propos allusifs et elliptiques ne donnent pas un message clair, la doctrine qu'il distille ne nous dit pas s'il faut admirer le personnage central Hamon BARVER ou s'il faut le vouer aux gémonies. On aura compris que Barber était un organisateur et un réorganisateur, que son expérience de la curie romaine l' a rendu habile, sans oublier ses intérêts. Une biographie de l'auteur nous aurait éclairés un peu mieux sur ses idées.Peut-être faut-il lire ce livre par simple curiosité d'une tranche d'histoire bretonne méconnue.



Gwenaël CONAN


Dîner pour deux de Mike Gayle


Izzy et Dave Harding, un jeune couple marié depuis trois ans viennent de subir un bouleversement psychologique. En effet, Izzy a fait une fausse couche et depuis ce jour, elle ne désire plus renouveler l'expérience et évite même ce sujet très délicat et épineux. Par ailleurs, elle est persuadée qu'elle n'est pas prête de toute façon à devenir mère. Dave quant à lui, contrairement à sa femme, réalise qu’il souhaite plus que tout au monde d’être papa... Un jour, sans qu’il s’y attende, une jeune fille le contacte et lui apprend qu’elle est sa fille.
J'ai beaucoup apprécié ce récit à partir du moment où entre en scène Nicola : les retrouvailles entre le père et la fille sont vraiment attendrissantes et émouvantes. C'est fascinant de suivre la complicité et les affinités qui naissent entre ces deux protagonistes : les moments de partage lorsque qu’ils se découvrent mutuellement, apprennent à se connaître, ou tentent de rattraper le temps perdu. Seulement, leurs rencontres restent tout de même clandestines car Dave n’en a dit mot à sa femme et Nicola fait des cachoteries à sa mère. Combien de temps croient-ils pouvoir faire durer ce genre de secret ?
J'avais ressenti de la compassion pour Dave qui ne savait plus quoi faire entre avouer la vérité ou continuer à mentir à Izzy. Ce n'est pas simple ni agréable pour une épouse d'apprendre que son mari a un enfant avec une autre femme. Personnellement, je préfèrerai mille fois que l'homme que j'aime soit sincère et m'informe des vérités même si celles-ci risqueraient de beaucoup m'affecter. Je pense vraiment que raconter des mensonges ne mènera jamais à nulle part, excepté vers la perte de la confiance de l’être aimé.
« Un dîner pour deux » est un roman moderne et facile à lire avec un vocabulaire accessible à tout le monde. Certes, ce n’est pas de la grande littérature, mais au moins a le mérite de permettre aux lecteurs de s’évader et de passer un bon moment. Le style utilisé rend la lecture vraiment agréable, il est très fluide et rythmé, avec une cadence soutenu pour chaque chapitre. Les événements s’enchaînent et donc, il y a très peu de temps mort. On ne s’ennuie pas.
Concernant les personnages principaux cités, ils sont réellement sympathiques et attachants, sans compter Fran, la collègue de Dave que j’apprécie beaucoup.
J’aime bien Mike Gayle, auteur « spécialisé » dans les histoires modernes et contemporaines, abordant souvent le sujet « couple ».



Ngan Dai GRAMOLINI


dimanche 27 décembre 2009

Bienvenue au club de Jonathan Coe


Ce roman se déroule en Angleterre dans les années soixante-dix. Il nous permet de découvrir la vie sociale et politique du pays en suivant l’histoire de trois adolescents, Benjamin, Philip et Doug, ainsi que celle de leurs proches. Même si le contexte historique du roman m’était inconnu, ce livre m’a permis surtout de partager et de retrouver les questions, les doutes que j’ai pu rencontrer dans mon adolescence : les choix à faire pour mes études, mes amis et, surtout, les sensations et les sentiments que l’on ressent lorsque l’on rencontre son premier amour : celui qui transporte et qui nous fait nous sentir tellement bien. Jonathan Coe réussi donc la performance de nous apprendre toute une partie de l’histoire sociale de l’Angleterre des années soixante-dix, que l’on ne connaît pas forcément en temps que Français, et il arrive à nous accrocher en décrivant parfaitement les sentiments de ces personnages avec qui on se trouve forcément des points communs.
Ce roman m’a fait penser à Eureka Street pour le côté social (tout en sachant que ce dernier se déroulait en Irlande du Nord), en plus léger ou plus exactement en plus accessible : les aventures des adolescents et de leurs proches sont plus importantes ici que les déboires sociaux des ouvriers qui découvrent la récession. Ou plutôt, je dirais que le roman est aussi social, qu’il est émouvant, sans être triste. Même si l’auteur s’attarde plus, au final, sur l’histoire de Benjamin, on est heureux de revoir par épisodes ses amis du lycée afin de pouvoir suivre les évolutions de chacun.
En bref, un roman humain, qui parle à tout le monde et qui, et ce n’est pas rien, apporte un éclairage sur les causes du conflit Angleterre/Irlande du Nord. Attention, il ne s’agit en aucun cas d’un roman historique, on suit principalement l’évolution des trois adolescents. Même s’il faut faire un effort au début de lecture pour se rappeler les liens familiaux entre les différents personnages, celui-ci est largement récompensé tant ce roman est passionnant et tellement intelligemment écrit.



Florent OLLIVIER


La Fatiha de Jamila Aït-Abbas


Jamila est née en France de parents algériens, mais elle a été élevée par une mère prisonnière des traditions de son pays natal. Un jour, sa mère lui propose de partir en vacances « au pays ». Elle accepte tout de suite sans réfléchir, mais ce « voyage n'est qu'un prétexte pour l'emmener là-bas et pour la marier de force, sous forme de promesse : la Fatiha.
Jamila se retrouvera attachée au lit nuptial par les femmes de sa famille. Quant à sa mère, elle lui enfonce un drap dans la bouche pour l'empêcher de crier ...
Jamila ne se soumettra pas, elle se battra pour retrouver sa chère liberté. Mais comment guérir après un drame pareil? Comment se reconstruire après cela? Et avant tout, comment fuir ce pays qu'elle ne connaît qu'à peine? Arrivera-t-elle à pardonner à sa mère, à sa famille?
Ce livre se lit d'un bout à l'autre facilement. Il nous montre le courage d'une femme qui se bat pour sa liberté et ses convictions. Bien que j'aie adoré ce livre, je reste quand même déçue par le fait que l'auteur ait choisi de faire autant de flashback, de retours en arrière. Ils sont un peu trop nombreux. Dommage aussi que ce livre ne suive pas un ordre chronologique.
On se plonge facilement dans ce livre. Est-ce dû à son écriture fluide, à ses détails nombreux qui nous font facilement voire les lieux, les personnages? Au fil de la lecture, on se retrouve plongé dans le monde d'injustice, de violence qui fait de la vie de Jamila un vrai cauchemar. Mais malgré toutes ses souffrances, elle continue à aimer sa mère.



Elodie RENAULT


samedi 26 décembre 2009

Mozart Tome III : Le frère du feu de Christian Jacq


Christian Jacq est connu pour ses ouvrages sur l’Égypte, mais a aussi écrit une biographie de Howard Carter (L’Affaire Toutankhamon), un célèbre égyptologue, et c’est de ce livre que se rapproche le plus Mozart. Ce dernier est une biographie en plusieurs tomes du grand compositeur, axée essentiellement sur ses rapports avec la franc-maçonnerie. Le troisième tome, Le frère du feu, couvre la période de 1785 à 1788 et narre le succès du jeune homme, ainsi que la composition de deux opéras symboliques et fondamentaux pour la franc-maçonnerie : Les noces de Figaro et Don Juan.
Étant une suite, ce livre est bien entendu dans la même veine que les deux premiers. Un quatrième est encore attendu. L’auteur utilise surtout des dialogues, avec peu de descriptions de lieu mais un luxe de détails pour les cérémonies maçonniques et leurs symboles. Des chapitres extrêmement courts et nombreux permettent une lecture très aisée et rapide. Comme d’habitude, le style est très efficace et on se retrouve très vite à la fin des différents tomes.
Par contre, je dois avouer que pour apprécier ce roman il faut quand même se laisser entraîner dans un monde étrange et symbolique, puisque Christian Jacq dissèque vraiment à la fois la vie et les œuvres de Mozart dans une optique ésotérique. On y découvre un homme entièrement voué à développer le savoir et les connaissances anciennes et à rechercher le bien, qui devient le Grand magicien par lequel tout doit s’accomplir. Cette vision des choses est bien loin de celle présentée dans le film Amadeus, où Mozart a tous les vices, est totalement immature et un brin fou. Ici, il est au contraire raisonnable et œuvre toujours en faveur des autres et du bien. C’est un personnage très sympathique cruellement touché par les vicissitudes de la vie (décès de deux enfants, de son père, pauvreté, jalousie de ses pairs…). Il garde néanmoins sa rectitude et développe surtout son génie, grâce auquel il traversera les siècles même si, de son temps, il restera le plus souvent incompris.
En bref, un ouvrage intéressant à conseiller bien évidemment à ceux qui ont lu les premiers tomes, et aussi à tous ceux qui s’intéressent à la musique, à Mozart ou à la franc-maçonnerie.



Anne ALBERT


Les carnets du Major Thompson de Pierre Daninos


William Marmaduke Thompson, ex-Major de l'armée Britannique, a longtemps servi aux Indes et dans d'autres contrées lointaines. Veuf, il s'est remarié avec Martine, une Française, et s'est installé à Paris, dans un pays non moins exotique à ses yeux... Avec l'aide de Pierre Daninos, il a donc décidé de publier ses carnets, recueil de réflexions sur la France, les Français, et leurs principales différences avec les Anglais. Relatant ses expériences à travers l'hexagone, le Major est sans cesse surpris par nos moeurs et déstabilisé par les incohérences de notre comportement. Tout l'étonne : nos réactions en société, notre administration, nos rapports à la politique, l'éducation de nos enfants, nos loisirs, notre façon de conduire, de recevoir, de voyager, de faire du sport... et bien sûr, de manger et de parler d'amour. Volontiers moqueur, rien ne lui échappe, mais c'est pour en conclure qu'il aime la France, devenue sa seconde patrie.
D'abord série d'articles pour le "Figaro", ce livre, publié dans les années 50, a rencontré à l'époque un succès phénoménal. Présentant ces textes comme les notes d'un vieux Major britannique, Pierre Daninos reprend la démarche de Montesquieu dans ses "Lettres Persanes", et dresse à travers le regard ironique mais bienveillant du Major Thompson, un portrait moqueur de ses compatriotes. C'est très drôle, mais d'un humour tout britannique, très pince-sans-rire. Le ton reste malicieux, et la charge n'est jamais violente. S'il s'amuse et s'étonne avec une certaine ironie, le Major n'est jamais sarcastique ni méchant. Le style est simple, le trait un peu outré, mais cette "étude ethnologique" n'a pour but que d'amuser, et elle y réussit parfaitement. La comparaison avec les Britanniques permet à l'auteur de les railler également, sans avoir l'air d'y toucher.
Cette lecture m'a charmée, et pas uniquement pour ce ton, cet humour très british que j'adore, et qui m'a rappelé Jerome K. Jerome. J'y ai également trouvé un mélange étonnant : d'un côté, ce portrait des Français, pour aussi caricatural qu'il soit, n'en est pas moins saisissant d'actualité, et de l'autre, on y retrouve la France des années 50, un peu désuète mais pleine de charme. Ce côté à la fois rétro et actuel, cet humour tendre et cette légèreté offrent un livre drôle et charmant, qui se déguste un sourire aux lèvres... et éventuellement une tasse de thé - anglais, bien sûr - à la main ! 



Fanny LOMBARD


vendredi 25 décembre 2009

Les trois roses jaunes de Raymond Carver


Comme tous les ouvrages en prose de Raymond Carver, Les trois roses jaunes est un recueil de nouvelles. Précisément sept nouvelles s’enchaînent ici, où l’auteur avec son art habituel nous conte les histoires de gens simples. Car les personnages de Raymond Carver ne sont jamais des héros. Ils travaillent parfois à l’usine, parfois ailleurs, on sait rarement où, et quand leur profession est intellectuelle, il nous semble pourtant très proche de nous. Ils ne font jamais rien d‘extraordinaire, ils vivent et c’est déjà beaucoup.
Dans Cartons, un homme essaye de refaire sa vie avec une nouvelle compagne malgré une mère qui l’encombre et le culpabilise. Dans Débranchés, chaque nuit une femme rêve, elle raconte ses rêves à son mari qui en est pourtant exclu. Il ne dit rien, mais ça l’énerve. Dans une autre nouvelle, un homme s’est laissé aller à une relation adultère sans en mesurer les conséquences, il est pétrifié, sidéré de se retrouver dans cette situation.
Les nouvelles sont souvent racontées à la première personne du singulier, depuis le point de vue du personnage principal. Elles sont pourtant émaillées de dialogues. Cette conjugaison de moyens évitent les platitudes des monologues intérieurs, elle rend la narration très vivante. Le lecteur se retrouve vite au cœur de la situation, pris dans les mêmes doutes et les mêmes interrogations que l’homme dont il lit l’histoire.
Raymond Carver raconte non pas des destins mais la succession, l’enchaînement de petits faits qui n’ont d’autre sens que celui qu’on veut bien leur donner. Il raconte comme parfois l’homme ne comprend rien à sa vie, comment l’insatisfaction le ronge et les responsabilités l’écrasent. Avec une économie de moyens littéraires assez époustouflants, il fait entrer le lecteur dans l’intimité de ces hommes et de ces femmes. Et c’est là la plus belle réussite de l’auteur, la proximité que ses personnages partagent avec le lecteur. Raymond Carver est un virtuose, chaque nouvelle est une réussite de sobriété qu’une écriture unique nous révèle. Avec ce qui semble être presque rien, il nous fait partager la part la plus secrète et la plus inavouable de notre humanité.

Jacky GLOAGEN

Les trophées de la cité morte de Jean-Louis et Doris Le May


Dans une Terre du Futur dévastée par une guerre totale déjà lointaine, le passé ne survit qu'à travers des légendes plus ou moins oubliées. Les Clans vivent de manière fort primitive dans des grottes, se tenant à l'écart des anciennes villes qui crachent encore parfois des monstres terrifiants. Parce qu'ils n'acceptent pas les règles étroites de la Tradition, parce que leur amour ne supporte aucune entrave, deux jeunes gens du Clan de Sul vont s'élever contre la haine que leur porte la Mère du Clan et défier les prétendants du Clan voisin de Ho auxquels ils ont été promis. Les épreuves seront choisies difficiles : Les hommes-serviteurs vont devoir affronter les Chimères qui hantent la Cité Morte et ramener comme trophée les yeux de l'une d'elle, tandis que les femmes-maîtresses devront obtenir la reddition ou la mort de leur rivale par tous moyens. Or Kar et Erle de Ho semblent bien plus forts et plus aguerris que Ion et Sri Ea de Sul...

Nos héros semblent très frustres de prime abord, luttant contre un monde sauvage qui ne les épargne guère, mais on leur découvre vite une profondeur et des qualités insoupçonnées : leur amour qui les porte et leur donne la force de se surpasser, leur esprit alerte qui les pousse à la curiosité et à la remise en question des règles séculaires, leur refus de la violence inutile, leur soif de liberté... De plus, au fil de l'épreuve quasi initiatique, les jeunes gens vont avancer dans leur connaissance du monde et d'eux-mêmes et devenir de page en page plus attirants et intéressants. Les personnages secondaires sont pour leur part à peine esquissés, fondus dans les descriptions de l'environnement et des actions des héros. La société nouvelle est brossée à petites touches précises que l'on découvre au fil des pages, jamais trop à la fois pour ne pas lasser : la loi rigide, qui donne la prééminence aux femmes ; les facultés psy de quelques élues qui peuvent communiquer mentalement, invoquer une lumière ou encore "fliter", c'est-à-dire contrôler partiellement une chute ; les rigueurs des conditions naturelles et la fragilité de la survie des Clans. Par contre, il n'y a guère de détails sur ce qui a mené l'humanité en ce point, et sur la nature exacte des monstrueuses Chimères robotiques qui vivent dans les anciennes cités et pourchassent les hommes : Un léger voile de mystère que chacun tranchera à sa guise...

Le style est fluide et poétique : Les phrases sont longues mais jamais complexes, le vocabulaire relevé mais accessible et d'une grande précision. Il n'y a pas de temps mort, l'histoire a beaucoup de rythme et une ligne directrice suivie de près. Les récits d'errances et de batailles sont allégés par de nombreux dialogues qui rendent les personnages et les situations plus vivants et que j'apprécie particulièrement.
C'est le deuxième livre de ce duo d'auteurs que j'ai entre les mains, et j'ai eu la même heureuse surprise que lors de ma première fois : un roman très agréable et intéressant qui surclasse aisément par ses qualités de réflexion et de cohérence les livres que l'on trouve généralement dans cette collection.

Marie-Soleil WIENIN

jeudi 24 décembre 2009

Pourquoi tuer le pépé ? de Charles Exbrayat


Le pépé a disparu depuis 9 jours et cela n’inquiète pas ses neveux qui ont l’habitude de le voir partir plusieurs jours. Et ils ne se permettraient pas de lui demander de rendre des comptes. Il a son caractère le pépé. Et puis, ce sont ses héritiers, les Salignon. Cette ferme qu’ils exploitent depuis des années, ils comptent bien en être propriétaire à la mort du pépé.
Seulement voilà, le pépé est retrouvé assassiné et les soupçons se portent sur les héritiers. Mais est-ce que les Salignon sont bien les héritiers ? A qui peut profiter le crime si les Salignon sont innocents ?
Le nouveau gendarme en chef est bien décidé à démêler l’affaire sans faire appel à la police de Lyon.
Comme toujours, Charles Exbrayat sait mieux que personne mettre en scène des crimes dans des atmosphères pittoresques. Son humour et ses dialogues ne sont pas sans rappeler les anthologies d’Audiard. D’ailleurs ils ont collaboré une fois ensemble sur le film « On n’aime qu’une fois » ( 1949). Je vous conseille vivement ce livre, qui se lit en une seule bouchée et qui vous donne l’envie de découvrir tous l’œuvre d’Exbrayat. Je ne me lasse pas de l’humour, des dialogues truculents, des atmosphères, des personnages hauts en couleurs de l’univers d’Exbrayat. Un petit mo ment de bonheur. A lire à la plage, dans le train…

Alexandra BERNEDE

Tristesse de la Balance et autres signes de Jacques A. Bertrand


Tristesse de la Balance et autres signes" est un recueil de 12 chroniques présentant les principaux traits caractéristiques des différents signes du zodiaque. Par exemple : le Bélier, un fonceur têtu et impulsif. Ou le Taureau, qui met du temps à réagir, mais est difficile à arrêter ensuite. Le Gémeaux est un beau parleur qui peut donner une impression de superficialité. Le Cancer, rêveur et fantasque, replié sur lui-même. Et si le Lion "en jette", la Vierge reste sage - même lorsqu'elle est folle. La Balance, évidemment, est la reine du compromis, de la modération.  A l'opposé : le Scorpion, susceptible, critique, toujours dans l'excès. Et
ainsi de suite jusqu'au Poissons, intuitif indécis, spécialiste des nages en eaux troubles...
Ce petit livre se présente donc au premier abord comme un ouvrage sur l'astrologie. Bien sûr, on y retrouve les 12 signes du zodiaque, avec pour chacun les grands traits et stéréotypes qu'on leur attribue généralement. Mais c'est bien plus que cela. Bien écrit, dans un style simple et agréable à lire, ce livre semble prendre l'astrologie pour prétexte, et regorge de saillies, calembours et mots d'esprit - au point qu'on a parfois peur d'en rater ! On pourrait craindre un texte un peu lourd, mais pas du tout : il y a une légèreté, une finesse qui confère à l'écriture une certaine élégance, voire une grâce vraiment charmante. Certains commentaires tiennent de l'humour noir, mais on navigue le plus souvent entre un humour potache et des réflexions beaucoup plus subtiles. C'est un livre gai, pétillant, plein de malice et de poésie.

Comme beaucoup de monde, il m'arrive de lire mon horoscope sans pour autant y croire... Bon : je suis bien obligée d'admettre que je me suis retrouvée dans le portrait de mon signe. Et que certains de mes proches sont vraiment Gémeaux ou Poissons ! Mais si j'ai aimé ce livre, c'est avant tout parce que j'y ai retrouvé cette "patte" propre à Jacques A. Bertrand, faite d'un humour irrésistible et tendre, d'une poésie et d'une finesse qui me ravissent dans chacun de ses ouvrages. "Tristesse de la Balance" m'évoque un bonbon à la menthe : frais, doux et piquant. C'est vraiment un livre délicieux, et je peux en dire autant de tout ce que j'ai lu de cet auteur jusqu'à maintenant.

Fanny LOMBARD

mercredi 23 décembre 2009

Graine d'ortie de Paul Wagner


Un jour de mars, Paul est « déposé » à l’Assistance Publique par sa mère.
Alors commence pour Paul un chemin qui n’aura rien de facile.
Un séjour dans le vieil hôpital de la Charité qui n’en porte que le nom, puis sa première famille d’adoption, les Maillard, dont le but essentiel est de toucher les sous de l’Assistance.
Ensuite Paul aura enfin droit à un peu de bonheur et d’amour en allant chez Mme Robin et son concubin. Peu après le décès de ce- dernier, Paul obtient son certificat d’étude et, pour aider Mme Robin, va travailler en tant qu’apprenti forgeron chez Mr Radeau. Après une période d’entente avec son employeur la situation se dégrade et devient carrément mauvaise quand Paul est obligé d’aller vivre chez Mr Radeau suite à la mort de Mme Robin.
A la fin de son apprentissage Paul va à la ville où d’autres mésaventures lui arriveront mais comme dit le proverbe à cœur vaillant rien d’impossible et Paul fait parti des gens qui ne se laisse pas abattre.

J’ai fortement aimé le style direct de l’auteur ainsi que le fait que cette histoire est perpétuellement en mouvement et narrée au présent.
Ce roman qui relate l’existence d’un enfant de l’Assistance Publique est fort intéressant car il nous montre l’institution de l’intérieur et cela n’est guère reluisant. Parfois même certains passages nous donnent l’impression d’être en prison.
Ce livre nous montre la difficulté de la relation « enfant- famille » quand les liens du  sang n’existent pas et que seul l’affectif doit absolument crée ce lien.
Dans ce cas l’enfant et l’adulte doivent savoir se rapprocher en acceptant les défauts des uns et des autres.

Dans ce roman autobiographique- ne l’oublions pas -, il y a des moments d’émotion comme la découverte par Paul de ses vraies origines, des moments de tristesse comme le décès de Mme Robin la « vraie » mère de Paul, des moments de désespoir mais cette histoire écrite dans un style simple et émouvant est, entre autre, porteuse d’un message d’espoir pour ceux qui souffrent. En s’accrochant, en se battant il est possible de réussir : voilà le message de Paul.
Les instants drôles sont également présents surtout avec le rat au hachi-parmentier.

Edouard RODRIGUEZ

Baby Boom de Jean Vautrin


Comme son titre l’indique, ce roman « Baby Boom » porte sur des histoires de bébés, mais plus encore sur la vie quotidienne de deux couples que tout oppose. D’un côté, il y a Amanda et Hugo qui sont plutôt modernes, élégants et soignés, s’adaptant parfaitement à notre société de consommation ; de l’autre, il y a Alice et Jack, qui ont choisi, quant à eux, de mener une existence très écologique. Leur maison est bourrée d’objets destinés au recyclage. Certains débordent même jusque dans leur jardin. Les deux couples attendent la venue de leur premier enfant avec impatience. Seulement ils vont rapidement réaliser que devenir parents est un vrai travail à plein temps qui demande beaucoup d’investissement et d’implication personnels.                 
C’est la première fois que je lis cet auteur « Wendy Holden » et j’adore ! Le récit est vraiment intéressant et captivant. C’est une merveilleuse idée que d’aborder ce sujet très à la mode : l’écologie. Cependant, dans cet ouvrage, « l’écologie » est traitée est de façon très extrême, on la découvre à travers le comportement et l’attitude de Jack et j’avoue que je n’adhérerai jamais à sa façon de vivre. En effet, lorsqu’on observe Jack qui recycle vraiment tout jusqu’à utiliser des frisbees en guise d’assiettes, des pots de confiture comme verres, ou encore un cageot qui fait office de lit pour son bébé…. franchement, ça fait un peu peur ! Il est bien sûr recommandé d’agir en faveur de l’écologie, mais il faut savoir s’arrêter, car je ne crois pas que réutiliser des préservatifs usagés soit très conseillé. Jack me fait penser à un fanatique. C’est dommage car au début du roman, on l’appréciait bien, il semblait très attentionné envers sa femme Alice et se préoccupait du bébé.
Les quatre personnages principaux sont très différents les uns des autres au niveau de leur personnalité. Mais mon préféré reste Hugo que je trouve particulièrement charmant et attendrissant. Ce dernier a su évoluer psychologiquement tout au long du roman : il a tout simplement mûri avec la naissance de son fils Théo, et est devenu un papa responsable, contrairement à sa femme Amanda qui demeure égocentrique et superficielle. J’ai commencé à apprécier Alice que lorsqu’elle a fini à être une femme naïve et crédule. Pour ma part, j’aurais vite divorcé, je n’aurais pas supporté Jack le « gourou ».
Ce livre est facile à lire et est rempli de rebondissements. On ne s’ennuie pas une seconde et une fois la lecture commencée, on n’a plus envie de lâcher « Baby boom » tellement l’histoire est entraînante. Le recyclage compulsif de Jack fait souvent sourire tellement cela paraît irréel et inimaginable. Ce roman est génial !

Ngan Dai GRAMOLINI

mardi 22 décembre 2009

Le libraire de Régis De sa Moreira


C’est l’histoire assez surprenante, d’un libraire dans sa librairie. A grands coups de répétitions, l’auteur nous entraine dans les pensées de cet homme. Le libraire est seul dans sa boutique avec ses livres et ses quelques clients, qu’il observe et à propos desquels, ils se racontent des histoires. Entre temps, il lit.
L’auteur utilise de nombreux dialogues, courts, avec peu de mots, des mots banals de tous les jours qui démontrent la solitude, la banalité de la vie du libraire, sa monotonie en utilisant de nombreuses répétitions, notamment le mot libraire, mais aussi des phrases entières.
J’ai beaucoup aimé ce livre, qui parait un peu farfelu avec des moments amusants, plein de trouvailles, et qui relate la vie d’une librairie avec tous ses clients disparates aux goûts différents. Le libraire, lui, semble heureux dans son monde où les livres sont rois. Cependant, j’ai ressenti comme une profonde solitude dans la vie de cet homme. Pour s’inventer autant d’histoires, il vit à travers ses livres, mais pas « réellement ».
Très bon livre, original, à découvrir absolument !

Hélène SALVETAT

L'homme et le sacré de Roger Caillois


Avec cet ouvrage, le sociologue Roger Caillois a tenté de comprendre la signification du sacré en comparant les sociétés archaïques et les sociétés développées.
À la fin de son livre il analyse ainsi ce qui relève du sacré, « qui donne la vie et la ravit » comme il l’annonce sur le quatrième de couverture, dans la fête et dans la guerre (pp.215-224). Nous découvrons alors les mêmes principes de transgression des règles, d’abolition des interdits et d’énergie destructrice dans les deux situations qui auraient pour fonction de renforcer les structures sociales existantes.
Ce livre, qui se situe à la frontière entre la philosophie et la sociologie, est un des livres incontournables de tous les étudiants en sciences humaines et sociales et permet de se familiariser avec un sujet difficile, analysé de manière méthodique, tout en découvrant, au fil des pages, un sujet présenté sous des angles très variés.

Pierre SECOLIER

lundi 21 décembre 2009

Carrie de Stephen King


Carrie est une jeune fille de seize ans tout ce qu'il y a de plus banale, mais elle est profondément malheureuse...
En effet, elle est le souffre douleur des autres élèves. Et sa mère, elle, est une profonde adepte de la religion et pense que chaque acte est péché, elle force donc Carrie à prier avec elle des heures durant pour se faire pardonner...
Avec Carrie, les autres filles sont vraiments des pestes, elles lui jettent des serviettes hygéniques et lui font bien d'autres souffrances.
Un jour, la jeune adolescente remarque qu'elle a un don de télékinésie...
Alors quand le petit-ami d'une de ses ennemies l'invite au bal de fin d'année, elle accepte... mais s'il s'avérait que ce soit un piège causé par les autres élèves , dans ce cas... elle pourrait faire d'énormes ravages, bien pire qu'on puisse l'imaginer !
J'ai vraiment aimé ce livre! Il est plein de suspens, l'histoire est entrainante et Stephen King sait nous surprendre jusqu'au bout du roman. On rentre vraiment dans l'histoire et on ressent les sentiments de Carrie qui reste néamoins un personnage mysterieux.
En résumé, ce livre est vraiment super et à lire à tout prix!

Nolwenn RAULET

Le chemin des écoliers de Marcel Aymé


"Le chemin des nuages blancs" relate les pèlerinages d'un moine bouddhiste au Tibet de 1932 à 1949. Ce moine lama Anagarika Govinda est Allemand, comme son nom de religion l'explicite clairement. C'est un pèlerinage un peu plus sportif que celui de Compostelle, je n'en disconviens pas. Le titre est une citation de Maitreya, le futur Bouddha, lorsque, moine errant il parcourait le monde:"Solitaire, je parcours des milliers de kilomètres et je demande mon chemin aux nuages blancs".Un moine bouddhiste versé dans les écritures, de tempérament intellectuel et artiste, découvre au Tibet la connaissance expérimentale de sa religion et des possibilités surnaturelles de l'esprit humain, en communion avec les forces de la nature. Il décrit de manière tout à la fois précise, ethnologique et poétique une population, des traditions, des phénomènes psychiques inédits pour un Occidental. Il a écrit une véritable monographie sur le Tibet, son peuple, sa religion, son art, sa musique envoûtante, son histoire et sa géographie. Il décrit des personnages dans toute leur densité humaine et leur envergure spirituelle. Lama Anagarika Govinda a mis ses tripes dans son livre et veut nous faire partager son amour du Tibet et de ses habitants, il a réussi en ce point et donne des envies d'en connaître plus. Toute une masse d'informations est transmise au milieu de poésie, de visions contemplatives et d'expériences spirituelles, sans perdre son fil l'on passe du chaud bouillant  au froid mortel comme les climats extrêmes de cette contrée. Il y a corrélation positive entre sa découverte du pays et son exploration des profondeurs insoupçonnées de l'esprit.
Tout cela est bien beau même s'il ne nous laisse pas rentrer dans le Saint des Saints de l'expérience mystique et de la relation de maître à disciple, il ne révèle pas ses secrets de fabrication et c'est frustrant. Peut-être a-t-il écrit là-dessus ailleurs?J'aimerais lire la suite...

Gwenaël CONAN

dimanche 20 décembre 2009

La comtesse de Monte-Cristo de Michel Levine



Le 7 février 1880 en Nouvelle Calédonie, la petite Louise Bastien 8 ans, assiste impuissante au meurtre de son père, déporté politique, par deux hommes dont un boiteux. Sept ans plus tard, nous retrouvons cette jeune fille dans le pensionnat des sœurs du Rosaire, aux confins de la Bourgogne. Elle supporte tant bien que mal l’autorité, les contraintes, les moqueries de ses camarades dues à sa condition inférieure, jusqu’au jour où la mère supérieure lui annonce son prochain départ pour un couvent de Dijon. C’en est trop pour cet esprit épris de liberté, d’indépendance et surtout de vengeance envers les assassins de son père. Elle décide donc de s’enfuir vers Paris. C’est alors le début pour elle d’une série de rencontres et d’aventures qui vont lui faire vivre bien des moments inoubliables…
Autant le dire tout de suite cette histoire n’a rien à voir avec le célèbre roman d’Alexandre Dumas « Le comte de Monte-Cristo », si ce n’est que l’héroïne est obnubilée par son désir de vengeance. Peut-être aussi parce que Michel Levine fait évoluer des personnages fictifs au milieu de personnages et d’évènements réels, comme savait si bien le faire Alexandre Dumas. Cela étant dit c’est quand même un roman bien agréable à lire qui nous est proposé. Le rythme est vif, l’écriture est claire, on se laisse donc facilement entraîner par l’histoire. Le dénouement aurait peut-être pu être un peu plus développé, à moins que l’auteur n’ait donné une suite à cet ouvrage, en tout cas on en attendrait presque une. Toujours est-il que la période en toile de fond est intéressante parce que instable au niveau politique (la IIIe république en danger avec la montée en puissance du boulangisme et de l’anarchisme, le réveil des monarchistes et la colère des républicains), donc propice aux complots et donc aux histoires riches en rebondissements. Les personnages que croisent Louise qu’ils soient anonymes ou connus (Degas, Aristide Bruant, Courteline, Louise Michel…) apporte au récit une touche de couleur, et parfois d’insouciance qu’on ne demande qu’à partager le temps d’un roman. Bref un livre bien sympathique !

Nicole VOUGNY

L'école de la chair de Yukio Mishima


Taeko, jeune femme de quarante ans, libérée, divorcée, issue d’un milieu argenté et à tendance occidentale exerce le métier de créatrice de mode. Son job lui fait rencontrer les gens de la haute société et participer à de nombreux cocktails et soirées mondaines de Tokyo. Mensuellement, elle rencontre ses amies Suzuko et Nobuko lors des soirées des « Beautés Toshima ».
Lors d’une sortie, elles vont au Hyacinthe, un bar gay de la capitale et Taeko tombe sous le charme de Senkitchi le barman. Ce dernier en échange de cadeaux et d’argent accepte d’avoir une relation avec Taeko.
Mais jusqu’à où cette aventure va-t-elle emmener Taeko ?
J’ai aimé ce roman car encore une fois Mishima radiographie les gens, les sentiments avec une finesse déconcertante mais surtout nous donne une image de la société tokyoïte peu morale où l’apparence compte énormément : les beautés Toshima des filles aisées que leur milieu social fatigue et ennuie. Senkitchi, garçon pauvre venu de la campagne, veut monter dans l’échelle sociale le plus rapidement possible et ceci sans aucun scrupule.
Les descriptions des quartiers populaires, des tenues vestimentaires, l’opposition Occident- Orient représentée par nos deux protagonistes rendent ce livre agréable à lire.
N’oublions pas « l’histoire d’amour » et ce je t’aime moi non plus qui nous accompagne dès que Taeko et Senkitchi se rencontrent. Taeko qui sait que son amant n’est qu’un gigolo et Senkitchi conscient que Taeko en a assez des hommes BCBG de son milieu social.
Finalement ce roman nous montre l’ascension sociale, grâce à ses relations sexuelles avec une femme cossue, d’un jeune homme au visage angélique mais pauvre.
Ah oui !! Malgré le titre sulfureux du livre, point de description torride comme on aurait pu se l’imaginer

Edouard RODRIGUEZ

samedi 19 décembre 2009

La vie des maîtres de Baird T. Spalding


C'est un ouvrage déroutant.Oeuvre de fiction ou véritable investigation scientifique? Aujourd'hui il serait étiqueté New Age mais il ne se résume pas à  ça. Il est préférable de le lire comme un récit de voyage d'étude accompli au début du vingtième siècle par onze scientifiques américains aux confins de l'Inde, du Tibet  et de la Chine.Des mystiques indiens et tibétains accomplissent des prodiges et  communiquent un enseignement universel, syncrétiste? au lecteur de juger, il y trouvera quelque chose à lui convenir ou alors le livre lui tombera des mains. L'auteur au moins, ne cherche pas à influencer le lecteur et le laisse libre de croire ou pas, il ne viole pas les consciences. Il y a  des passages où l'on se demande si Spalding n'a pas fumé la moquette ou forcé un peu trop sur le Beaujolais, mais je m'égare...il a même travaillé avec Cecil B. Demile, c'est tout dire. La description des personnages, des situations et des sites fait rêver.
Avant de se lancer dans ces lectures il serait bon d'avoir lu un résumé des Védas, de la Bhagavad Gita, du Maha Bharata et des yogas sutras de Patanjali, pour la partie hindoue ou encore "Le voyage aux sources " de Lanza Del Vasto, et d'avoir quelques connaissances succinctes sur l'enseignement du Bouddha Sakyamuni(le sermon sur les quatre nobles vérités et la voie du milieu), pour ne pas être trop dépaysé.
Dans ce livre, des scientifiques du pays des  nouvelles technologies vont à la rencontre du surnaturel pratiqué par des mystiques d'Asie, berceau d'écritures sacrées.
C'est peut-être le plus grand intérêt de cet ouvrage.

Gwenaël CONAN

vendredi 18 décembre 2009

La maison du bout du monde de Michael Cunningham


La maison du bout du monde est un beau roman polyphonique. Jonathan, Bobby, Alice et Clare se succèdent pour nous raconter vingt cinq ans de leur vie. En un peu moins de trente chapitres, les quatre protagonistes se relaient et prennent chacun à leur tour la parole pour nous relater leur histoire commune. Chaque narration complète et enrichie, accentue ou nuance la précédente. Le roman est découpé en trois parties qui correspondent à trois périodes successives de leur vie.

Jonathan et Bobby sont au début du roman deux jeunes adolescents de quatorze ans. Ils vivent à Cleveland, un endroit sinistre. Ils découvrent l’amitié, l’amour, la musique, les Doors, Jimmy Hendrix et bien d’autres encore, la drogue et la libération sexuelle. Woodstock vient de s’achever quelques années plutôt. Ils sont toujours ensemble, l’un avec l’autre. Bobby fuit, sa mère est morte, son père est un gentil alcoolique, paumé, il brûlera  avec sa maison. Alice, la mère de Jonathan, insatisfaite et indécise, les rejoint par instant pour fumer. Plus tard, quand ils sont plus vieux, à New York, Clare  rejoint le tandem.

Michael Cunningham va décrire leur errance, il excelle à nous faire palper le désarroi d’individus que la société laisse sans idéal, perdus face à la contradiction de la vie : avoir à la fois une vie scandaleuse et établie, libre. Chacun endosse différents personnages, mais c’est toujours décevant. Plus qu’une peinture des mœurs d’une époque, notre fin du vingtième siècle, Michael Cunningham explore la perplexité de vies pleines d’une tristesse existentielle, il nous révèle la précarité des vies sans certitude, quand les raisons se valent, quand les questions sont sans réponse. Pour le plus grand bonheur du lecteur, ces vies sont obscures et sans vérité.

Jacky GLOAGEN

jeudi 17 décembre 2009

La moustache de Emmanuel Carrère


Tout semble sourire au héros qui, marié à Agnès, mène une vie tranquille dans son appartement parisien, entre ses amis, sa famille et son emploi. Un soir, un peu par plaisanterie, il se rase la moustache, lui qui la portait depuis des années. Impatient de voir la réaction de son épouse, il est un peu étonné que celle-ci semble ne rien remarquer. Agacé, il en déduit qu'elle lui fait une farce... Mais des amis chez qui ils passent la soirée ne réagissent pas davantage. Exaspéré, il finit par demander à Agnès ce qu'elle pense du changement : elle lui soutient, interloquée, qu'il n'a jamais eu de moustache ! Le héros est déstabilisé : est-ce
vraiment un canular ? Agnès est-elle folle ? Est-ce lui qui délire ? Non, il en est persuadé : il a toute sa tête, et il s'est bien rasé la moustache ! Mais Agnès n'en démord pas, même devant de vielles photos. Lui-même commence à douter et il ne sait plus qui, de lui ou de sa femme, perd la raison...
Ce roman est étonnant à plus d'un titre. Le vocabulaire, simple et direct, est mis au service d'une écriture qui fait partie intégrante de l'histoire : les phrases longues, de structure parfois complexes, accentuant l'impression de folie et de spirale infernale, reflètent parfaitement l'état d'esprit du héros, qui reste anonyme. Aspiré dans son esprit, le lecteur n'a aucun point de repère, et impliqué dans son délire, ne peut se forger une opinion objective. C'est ce qui en fait un livre prenant, à la
conclusion déroutante et imprévisible. Car, derrière les hypothèses sur lesquelles on revient sans cesse en une boucle oppressante, la situation devient de plus en plus incontrôlable, angoissant crescendo culminant en un dénouement atroce, qui fait frisonner.
Ce livre, qui m'a évoqué Kafka ou Gogol, m'a bluffée. J'ai été fascinée par le cheminement mental du héros, et on ne sait jamais qui est fou et qui ne l'est pas, s'il s'agit d'une machination ou d'autre chose. On pourra trouver plusieurs sens à cette lecture : identité, regard des autres, folie, réel : tous sont intéressants. L'histoire m'a suffisamment accrochée pour que je ne puisse pas lâcher le livre, impatiente de connaître le dénouement. Qu'on y adhére ou pas, il s'inscrit dans la même ligne : dérangeant, angoissant... et pour moi, absolument atroce et terrifiant ! J'ai trouvé cette lecture vraiment troublante. J'en suis sortie secouée, mais je ne le regrette pas !
Fanny LOMBARD

mardi 15 décembre 2009

Bandini de John Fante

Bandini raconte l’histoire d’une famille d’immigrés italiens installée au fin fond de l’Amérique, dans une petite ville du Colorado. Svevo, le père, est un maçon volage et violent. Maria, la mère, est une bigote soumise à l’autorité de son mari. Arturo, August et Federico sont les trois fils de ce couple mal assorti. A travers le quotidien de cette famille, on est plongé dans une pauvreté âpre qui, si elle n’interdit pas les sentiments, force à les enfouir au plus profond de son âme. Pour ces gens-là, le rêve américain n’est demeuré qu’un vague idéal larvé et ils payent chaque jour un peu plus leur mise au ban de la société. Quand l’espoir n’existe pas, le quotidien n’est alors fait que de désillusion et d’humiliations.
L’essentiel de l’histoire se concentre au cœur d’un hiver rigoureux, période la plus difficile pour les Bandini puisque à cause de la rigueur du climat le travail se raréfie pour Svevo. Incapable d’honorer ses dettes quotidiennes, il les alourdit en passant ses nuits au casino. L’unité familiale déjà bien vacillante et sensée protéger de la violence ordinaire vole en éclats le jour où Svevo se laisse charmer par Mme Hildegarde, une riche cliente.
Fante, dans ce premier roman aux nombreux accents autobiographiques, décrit avec beaucoup de subtilité l’univers des Bandini et la complexité des relations humaines. On se retrouve tour à tour dans la peau du père, de la mère ou du fils aîné, Arturo. Ainsi, des situations qui pourraient paraître de prime à bord manichéennes se tintent de nuances au fur et à mesure qu’elles nous sont décrites du point de vue de chacun. De nombreux personnages gravitent autour de la famille et donnent une vraie épaisseur à la narration. Il y a Rosa petite écolière modèle à qui Arturo voue un véritable culte, Dona Toscana, belle-mère acariâtre de Svevo qui développe à son encontre une haine féroce et lui reproche son incapacité à tirer les siens du marasme ou encore Sœur Mary Célia, maîtresse d’école à l’œil de verre dont Arturo est l’un des souffres douleur. Sans jamais tomber dans le misérabilisme ou l’apitoiement, l’auteur nous livre une chronique familiale forte où la difficulté du quotidien fait de petites misères et de désirs réprimés frappe inexorablement chaque être.

Rémi VIALLET

lundi 14 décembre 2009

Les flibustiers de la sonore de Michel Le Bris


C'est un roman d'aventures quasi historique qui relate l'épopée des révolutionnaires français de 1848 et  des "bouchers de Cavaignac"rejetés par la France et déçus par elle qui émigrèrent en Californie à partir du Havre ou de Marseille via le Panama (le canal n'était pas encore creusé) jusqu'à San-Francisco, ville dépotoir, le "chancre mou" du 31ème Etat de l'Union. Nos protagonistes y survivent difficilement non sans panache et fortes personnalités: Pindray, Raousset- Boulbon, le Consul Colton, en compagnie de spécimens d'humanité, les"arsouilles et grisettes, grinches, escarpes, goualeux". L'or de la Sierra Nevada a ébloui les quarante-huitards qui pour une chimère sont devenus les "forty-niners" ou mieux les "kezquidiz" comme les surnomment les anglophones qui se gaussent de leur ignorance de l'anglais, mais prêts à tous les sacrifices pour palper le métal précieux et qui vont jusqu'au bout de leur passion. Des tensions surgissent vite entre les Américains, qui n'étaient que cinq cents colons en 1846, contre 10 000 Mexicains et 20 000  Amérindiens et les chercheurs d'or qui viennent de tous les horizons mais  la Californie est américaine depuis le 18 septembre 1850 et le pouvoir fédéral veut mettre au pas les arrivants, les soumettre au tribut sans toutefois éviter les tensions entre communautés et l'inversion du rapport de force. Nos charmants  révolutionnaires idéalistes sentent le vent tourner et quittent une chimère pour une autre. Ils répondent à l'offre de Paredes, le héros du Sonora qui s'était dressé contre le général Bustamante et Mexico. Sous la férule du Comte Raousset-Boulbon, fine gâchette et cavalier émérite; ils partent en expédition pour un nouvel Eldorado et marchent sur ses brisées.
L'histoire est vraiment originale et tient la route. Le début n'évite pas l'effet catalogue mais la force des personnages et leur destin tragique prennent vite le dessus. L'auteur domine de la tête et des épaules sa matière et nous montre qu'il sait décrire la ville et la promiscuité, la misère et la lie de la société comme chez Eugène SUE, avec un vrai amour du peuple et des petites gens, sans escamoter leurs travers humains. Il écrit de très belles pages sur la communion de l'homme et de la nature, c'est beau comme du Jim HARRISON et du Fenimore COOPER. Il sait prendre son temps pour planter le décor et dépeindre les personnages comme il sait accélérer le rythme et insérer de la tension dramatique, des scènes de western ou de batailles , il est tout aussi à l'aise à décrire la sensibilité féminine et l'innocence qu'à sculpter des hommes bruts de décoffrage et à relater des scènes triviales(Je pense aussi à ORO de Cyzia ZYKE). La palette de son talent est plus que riche.
J'ai adoré son bouquin et j'aimerais lire les autres.

Gwenaël CONAN

vendredi 11 décembre 2009

La mort de la terre de Joseph-Henry Rosny Ainé


La Terre, dans une centaine de milliers d'années, est devenue un désert montagneux et aride. L'eau a quasiment disparu, évaporée dans l'espace, absorbée dans les profondeurs de la planète. Les Derniers Hommes, qui ne sont plus que quelques milliers, subsistent dans une poignée d'oasis, à la merci des multiples séismes qui font disparaître les ressources. Le règne humain s'achève, cédant progressivement la place à une nouvelle forme de vie : les Ferromagnétaux, des minéraux indirectement issus des activités humaines et dont la proximité est mortelle à ceux-ci.

La race humaine est résignée. Contre le manque d'eau, la solution employée est l'euthanasie, acceptée par tous avec passivité. Seuls quelques individus espèrent encore et ont foi dans la possibilité de survivre...

Ce court roman a été écrit voilà près d'un siècle, mais il reste terrifiant d'actualité. Parmi les divers scénarios d'extinction de l'Humanité, Rosny Aîné, l'auteur du célèbre "la Guerre du Feu", a choisi d'explorer l'un des plus probables : Une projection visionnaire d'un futur où les Hommes dépérissent par insuffisance de ressources.

Bien que le vocabulaire soit recherché, les phrases sont courtes et simples, touchant directement le lecteur : Un style direct et poignant. Pour augmenter l'aspect science-fictif, l'auteur use de nombreux néologismes, inventant de nouvelles technologies à la disposition des humains du futur. L'emploi du passé (imparfait et passé simple) renforce l'ambiance de disparition du monde tel qu'on le connaît : L'Humanité est passée et révolue ; l'auteur n'emploie le présent que lors de la description des Ferromagnétaux, qui eux représentent l'avenir... Le lecteur ressent parfaitement l'accablement et l'apathie des derniers hommes, las et découragés, qui n'attendent plus rien. Le livre baigne dans une atmosphère tragique et désolante, le tout renforcé par un paysage apocalyptique de désolation.

Tous les événements sont décrits du point de vue du personnage central, Targ le veilleur, qui fait partie des rares qui luttent encore contre la fatalité. C'est aussi à travers ses pensées et souvenirs qu'on découvre comment l'on en est arrivés là. Accompagné de sa soeur et de sa compagne, il se distingue de ses semblables, étant le dernier à éprouver encore des sentiments forts : passion, espérance... Au fil des pages, on le voit lutter inlassablement et héroïquement contre les coups du sort qui s'abattent sans répit sur les hommes.
Un livre très fort.

Marie-Soleil WIENIN

jeudi 10 décembre 2009

Jane Eyre de Charlotte Brontë

Jane Eyre, de Charlotte Brontë, débute par le départ de l’héroïne, du même nom, en pensionnat pour orphelins. La fillette décide que, n’étant ni riche ni belle, il ne lui reste plus qu’à se lancer à cœur perdu dans les études. Plus tard, elle devient gouvernante au service d’Edward Rochester et ils vont progressivement tomber amoureux l’un de l’autre, mais certains secrets remontent alors à la surface… Heureusement, à la fin, tout s’arrange !
Ce livre est agréable à lire et se dévore extrêmement vite mais je n’ai pas du tout été touchée par l’histoire, bien qu’elle soit narrée à la première personne. J’ai vraiment été déçue parce que j’en avais lu beaucoup de bien mais j’ai trouvé l’ensemble plat. Il faut dire que Charlotte Brontë a écrit son ouvrage avant 1850 et que le sujet n’est plus très original aujourd’hui, pas plus que la manière dont il est traité. En fait, personnellement, la partie que j’ai préférée se situe au début, lorsque Jane est à l’orphelinat. Ensuite, je trouve que le tout s’enchaîne sans surprise - sauf une, d’ailleurs un peu tirée par les cheveux, et qui empêche le mariage de Jane. Là, pour le coup, on tombe dans la caricature !
Quant au style de l’auteur, il est très direct et épuré, avec des phrases courtes et très peu de descriptions. Cela ressemble plus à un compte-rendu, les échanges étant le plus souvent sous forme de dialogues et les descriptions réduites au minimum nécessaire pour donner un cadre à l’histoire. De même pour les états d’âme des personnages, à peine évoqués. C’est très efficace puisqu’on arrive tout de même à se faire une idée d’ensemble mais, pour moi, c’est insuffisant pour se laisser entraîner dans l’histoire.
Pour résumer, un livre plutôt pour les jeunes (d’ailleurs mon édition est de la Bibliothèque verte et j’ai compris pourquoi) mais que je ne conseillerais pas à des adultes…


Anne ALBERT

mercredi 9 décembre 2009

Où sont les hommes ? de Terry McMillan

Quatre amies blacks de Phoenix (Arizona), autant sexy que célibataires, proches de la quarantaine, dotant chacune d’une personnalité bien épicée, espèrent pour la plupart trouver l’âme sœur, mais avant tout, doivent faire face, pour chacune d’entre elles, à une situation familiale spécifique qui n’est pas toujours facile à orchestrer. Bernadine, fraîchement divorcée, doit assumer seule l’éducation de ses deux jeunes enfants ; Gloria, mère célibataire, gère comme elle peut la période d’adolescence de son fils Tarik de 17 ans ; quant à Robin, la plus dévergondée des quatre, mène sa vie amoureuse se manière très instable ; et enfin Savannah, récemment installée dans la ville, se demande si elle y trouvera l’homme de sa vie…
J’ai plus qu’adorer ce roman de Terry McMillan « Où sont les hommes », qui nous fait connaître la vie d’une petite communauté noire de Phoenix, avec ses associations comme le Mouvement des femmes noires, et nous fait suivre les aventures palpitantes de ces quatre copines dynamiques et débordantes d’énergie. Ce sont des femmes modernes des années 90 qui savent profiter de l’existence à leur façon et ne s’encombrent pas toujours avec les principes moraux, surtout lorsqu’elles rencontrent de beaux « étalons noirs ». Solidaires, elles savent se réconforter mutuellement et s’entraident dans les moments difficiles, notamment par des confidences ou des conseils bien avisés. Elles ne se laissent pas submerger par des problèmes qu’elles rencontrent au quotidien.
J’ai trouvé que l’histoire elle-même est intéressante et captivante, car l’auteur aborde des sujets certes classiques, mais très réalistes comme le célibat, le divorce, l’infidélité, la trahison, les mères célibataires, l’éducation des enfants, l’homosexualité, et bien sûr l’amitié avec un grand « A ».  Mais l’élément ce qui m’a le plus touchée est la terrible maladie d’Alzheimer du papa de Robin que je trouve vraiment terrible. J’espère que mes proches ne seraient jamais touchés par cette pathologie.
Le récit est facile à lire et à comprendre, le vocabulaire utilisé est à portée de tout le monde, et les événements s’enchaînent rapidement les uns derrière les autres, rythmés par des chapitres narrés par les quatre protagonistes chacune à leur tour. Cela permet ainsi de saisir les sensations et les émotions de manière profonde de Bernadine, Gloria, Robin et Savannah. Et puis, ces dernières sont drôles, sympathiques et tellement attachantes. On ne peut que les apprécier.
Tout comme l’autre ouvrage que j’ai lu de Terry McMillan « A la bourre et sans un rond », je n’ai pas été déçue par « Où sont les hommes » et je le conseille, c’est un très bon roman.

Ngan Dai GRAMOLINI

mardi 8 décembre 2009

L'étoile de Ratner de Don DeLillo


William Terwilliger Jr, dit Billy Twillig, est un petit génie des mathématiques de 14 ans. Il vient de recevoir le Prix Nobel. Des scientifiques l’appellent à leur secours pour les aider à trouver la clé d’un message envoyé depuis la lointaine étoile de Ratner par des supposés extraterrestres. Le roman commence quand le jeune enfant arrive dans un centre de recherche ultra secret en plein désert nord américain.
Don Delillo jette là les bases d’un roman de science fiction des plus classiques. Il prévient le lecteur : le message de Ratner nous dira quelque chose sur nous-même. Tout est mis en place, mais comme le métaphorise assez rapidement l’inondation d’ombre du centre de recherche, le récit échappe aux canons de la littérature d’anticipation.
A l’instar d’Alice aux pays des merveilles, les premières journées du jeune mathématicien sont remplies de la succession des rencontres de tous les scientifiques qui avant Billy ont essayé de percer le secret de Ratner. La galerie de portraits vire au délire et au cauchemar. Il y a des logiciens transitionnels manchots et cyniques, des métaphysiciens de la fourmi rouge, des chamans…, tout une pléiade aberrante. Don DeLillo nous montre comme la science n’est jamais loin de la mystique, comme le langage scientifique glisse lentement vers les pires spéculations.
L’étoile de Ratner est un faux roman de science fiction, constitué essentiellement du discours des chercheurs, de longues discussions scientifiques entre les différents protagonistes. C’est donc un roman très vivant. Très vite l’intrigue tourne court, le message devient secondaire, les scientifiques ont dépassé cette volonté de l’interroger, ils veulent aller plus loin. Le centre de recherche offre une belle métaphore du roman dynamité depuis l’intérieur : le centre repose sur un trou, l’ébauche d’un premier projet avorté.
L’étoile de Ratner est un brillant roman plein d’humour ; il manie bon nombre des thèses scientifiques actuelles et nous offre une autre vue du monde des sciences.

Jacky GLOAGUEN

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