jeudi 8 janvier 2009

Comme neige au soleil de William Boyd

La toile de fond du roman est la Première Guerre Mondiale vécue au Kénya, en Tanzanie et en Rhodésie. Les Britanniques s'y opposent aux Allemands. Les cinq personnages principaux sont deux jeunes Anglais, l'un officier de carrière: Gabriel, l'autre jeune étudiant à Oxford : Francis ; un colon américain: Temple qui possède une exploitation de sisal, entre autres, au pied du Kilimandjaro; un colon allemand: Von Bishop qui possède également des terres mais en Afrique Orientale Allemande et sa femme qui semble se flétrir en Afrique. La guerre perturbera leurs destins. Le personnage principal serait plutôt la guerre qui détruit les carrières, les mariages, les familles, les exploitations agricoles, les santés et les vies. La guerre est un accélérateur de l'Histoire qui modifiera la carte géopolitique de l'Afrique orientale. Dans ce récit il n'y a aucun acte d'héroïsme, l'on y voit que mesquinerie, bas instincts et comportements prosaïques. L'auteur a trempé sa plume dans le vitriol et peint un tableau réaliste au possible. Il est visiblement très bien documenté et nous permet de feuilleter les pages de son roman comme on le ferait d'un album contenant des photos couleur sépia. Il n'y a aucun orgueil national chez l'auteur, aucune nostalgie de l'Empire, aucun esprit cocardier, la guerre commence très mal pour les Anglais et il n'hésite pas à décrire cruellement des scènes de couardise, à la fin les Britanniques remportent la victoire grâce au nombre de soldats , aux moyens mis en action et à leur détermination. Comme un peintre, le romancier dépeint les horreurs de la guerre (Goya), jette une violente lumière latérale crue (Le Caravage), analyse la réalité sans faire de concessions (Rembrandt). On est très loin du romantisme panthéiste de Goethe, « Les souffrances du jeune Werther » qui est le livre offert par Madame Von Bishop, infirmière le temps du conflit, à son patient Anglais, Gabriel; et de la nostalgie à la Karen Von Blixen ( Out of Africa). L'on se rapproche bien mieux du récit de Burton et Speke ; « A la recherche des sources du Nil ». Il y a du scientifique et du descriptif naturaliste. William BOYD a écrit un roman génial et rassurez-vous, il y a suffisamment d'humour pour faire passer les réalités sordides. Il n'y a pas de quoi sombrer dans la neurasthénie ou se tirer une balle. C'est fort et sombre comme du thé noir kényan, coloré comme un mug anglais et fumé à la tourbe comme du whisky écossais. Gwenael CONAN

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