lundi 2 mars 2009

Rabbit rattrapé de John Updike

L’année 1969 aux Etats Unis. Les Américains sont engagés aux Vietnam et 40 000 soldats y sont déjà morts. La contestation enflamme les universités et le système économique subit l’inflation. Le mouvement afro-américain des droits civiques s’amplifie et à l’assassinat de Martin Luther King succède celui de Robert Kennedy. La décennie qui s’achève est une période d’incertitude et de doute. Les premiers pas de Neil Amstrong sur la Lune ne cachent rien du renversement des valeurs traditionnelles de la way of life. En Pennsylvanie, dans la petite ville de Brewer, Harry Angstrom, surnommé Rabbit, est linotypiste. « C’est un brave gars raciste et impérialiste typique » à l’image de tous ces américains de la classe moyenne. Sa femme s’ennuie et elle boit. Elle prend un amant et retrouve un peu de sa joie de vivre. Quand elle le quitte, le laissant seul avec son fils Nelson, Harry se trouve désemparé : quelque chose lui échappe, la marche du monde lui est devenue totalement étrangère. Son chemin va croiser celui de Jill, une frêle adolescente de la haute bourgeoise qui est en fuite, et celui d’un jeune soldat noir démobilisé qui est recherché par la police, Skeeter. A la fois fasciné et dégoûté, troublé, Harry les héberge. L’amour libre et la drogue côtoient pendant plusieurs semaines leurs discussions politiques. Au final, l’unité de cette nouvelle famille est réconfortante mais désastreuse. En ne choisissant pas un intellectuel ou un artiste pour héros de son roman, John Updike réussit à nous rendre très proche le tumulte des années 60 aux USA. Avec Harry, son héros si attachant, il nous touche et nous étonne. En Skeeter il dépeint un déconcertant et effarant jeune noir, à la fois prédicateur inspiré de religiosité rudimentaire et imbibé de drogue, plein d’illusions, de grandeur et de colère, d’indignation et de rage. Le style de John Updike est limpide et facile. Les dialogues sont vifs, parfois émaillés d’un beau vocabulaire trivial qui nous rend plus vivant l’impétuosité des désirs sexuels ou des colères noires de ses personnages. La lecture de ce gros roman de 500 pages qui succède à Cœur de lièvre, est un plaisir de bout en bout.
Jacky GLOAGUEN

Aucun commentaire:

Publicité