mardi 26 avril 2011

Le ventre de Paris de Emile Zola


 Florent s’est évadé de Guyane où il avait été déporté suite à sa compromission dans les événements du 2 Décembre. Il trouve refuge chez son frère, Quenu, qui est charcutier au plein cœur des Halles de Paris. Il devient inspecteur de la marée. Commence le quotidien d’un Maigre entouré d’une foule qui n’a qu’un objectif : le faire grossir.
 « Le Ventre de Paris » est le troisième tome des Rougon-Macquart paru en 1873. J’ai beaucoup apprécié cette longue et belle œuvre. J’ai notamment
particulièrement aimé la plume singulière de l’écrivain qui sait rédiger des descriptions si poétiques. On a d’ailleurs pu qualifier son texte de « prose descriptive ». Il prend manifestement plaisir à décrire les Halles de Paris, les étalages gargantuesques de légumes, de fruits, de poissons, de viandes, de fleurs, de fromages, … Vers la fin de son roman, Zola utilise des métaphores musicales pour décrire l’odeur pestilentielle des fromages qui s’étalent sous ses yeux, en témoigne cet extrait : « Elles restaient debout, se saluant, dans le bouquet final des fromages. Tous, à cette heure, donnaient à la fois. C’était une cacophonie de souffles infects, depuis les lourdeurs molles des pâtes cuites, du gruyère et du hollande, jusqu’aux pointes alcalines de l’olivet » (p. 340). Les étals nous apparaissent dans toute leur matérialité, avec leurs cortèges de couleurs, d’odeurs, de saveurs. On a pu dire que cette œuvre de Zola pouvait être comparée à une véritable nature morte, l’auteur donnant à voir à travers ses mots une vraie peinture, telle qu’aurait pu la concevoir Claude, l’artiste qu’il décrit au fil des pages.
Zola croque une véritable fresque de la bourgeoise parisienne à travers la galerie de personnages qu’il présente : Florent, le fuyard, Quenu, son frère, la belle et grasse Lisa qui tient la charcuterie. Il y a aussi Marjolin et Cadine, les deux brutes éprises l’une de l’autre qu’aime à peindre Claude, l’artiste. N’oublions pas Mlle Saget, la médisante petite vieille, qui constitue un personnage repoussant. Zola fait tous ces personnages une véritable analyse psychologique.
J’ai été particulièrement sensible au début de l’œuvre : l’écrivain nous décrit l’arrivée de Florent dans les Halles luxuriantes qui offrent un trop plein de nourritures, un luxe démesuré. Le lecteur est saisi de pitié devant cet évadé affamé (il n’a pas mangé depuis plusieurs jours) qui observe avec beaucoup de convoitise ces monceaux de victuailles qui s’offrent à ses yeux et à son odorat. Face à cette prodigalité, Zola oscille entre fascination et répulsion.
Une belle œuvre naturaliste qui expose la lutte entre les Maigres et les Gras sur un fond politique marqué. On ne retrouve pas ici de drame amoureux, comme dans « La bête humaine » par exemple. Le propos est ici plus centré sur l’engagement politique. Il faut donc bien connaître l’histoire de la fin du XIXème siècle. A savourer sans modération !
Le lecteur complétera utilement sa lecture par un dossier en fin d’œuvre. La préface d’Henri Guillemin est aussi très éclairante.


Christelle GATE

Aucun commentaire:

Publicité