vendredi 11 janvier 2008

Vent d'est, vent d'ouest de Pearl Buck

Jusqu'ici je l'ignorais mais en ouvrant le livre de Pearl Buck, j'ai appris que j'avais une soeur, Kwei Lan et qu'elle avait entrepris de me livrer son coeur. Kwei Lan est chinoise. Elle est très jeune et ne connaît du monde que ce qui se passe au sein de la maison familiale dont la vie est rythmée par les mêmes gestes, les mêmes rituels depuis la nuit des temps. Les rapports familiaux y sont très codifiés et les attentes des parents envers les enfants fortes et précises. Chaque individu doit s'y comporter comme l'exige son rang dans la société et rien ne peut y changer. Née fille dans un pays où seuls les hommes sont appelés à jouer un rôle dans la cité, la jeune femme se plie en tous points à ses obligations sans envisager la moindre possibilité qu'il en soit autrement.
Or, le moment est venu pour elle d'épouser l'homme auquel on la destine depuis son enfance, et celui-ci est médecin converti aux méthodes scientifiques occidentales. Projetée dans un univers totalement nouveau et ne pouvant plus trouver refuge auprès de sa mère, elle est affreusement désemparée. Les façons qu'il a de vivre et de se comporter avec elle, bien qu'empreintes d'un profond respect, la choquent et la blessent. Toutes les valeurs qu'elle a reçues et qui l'ont fait devenir ce qu'elle est sont complètement remises en cause. Petit à petit, portée par l'amour réciproque qui naît entre ces deux êtres, Kwei Lan va doucement se laisser apprivoiser et accepter de considérer qu'il peut y avoir un autre façon d'exister, de penser, en un mot de vivre. La personnalité de sa belle-soeur et le combat que devra livrer son frère pour se libérer du poids de la destinée qu'on lui a tracée, l'aideront à ouvrir les yeux sur d'autres coutumes. Prise à témoin de cette métamorphose et malmenée par les turbulences de ses réflexions contradictoires, j'ai maintes fois été touchée par ce que l'ignorance de l'autre, l'intolérance incarnée par la mère de Kwei Lan, la volonté de rester figé dans ses certitudes peuvent engendrer de souffrances et de douleurs indélébiles. La délicate et douloureuse métamorphose de la jeune femme, telle un papillon sortant de sa chrysalide est bien souvent bouleversante.. Kwei Lan nous amuse aussi par le regard moqueur qu'elle pose sur nos étranges comportements d'occidentaux, comme se secouer les mains pour se dire bonjour par exemple ou encore nos cheveux jaunes ou nos yeux délavés. Déchiréee entre deux civilisations, ce personnage incarne les prémices de l'inéluctable mutation de la Chine. Ce roman traite de thèmes essentiels dans la vie des hommes : le conditionnement de l'éducation, la capacité à s'adapter et à évoluer, la puissance de l'amour, la différence. Pearl Buck s'adresse à nous par la bouche de son personnage dans un style à la fois familier et poétique et l'impression finale qui s'en dégage serait que l'on peut parler de choses sérieuses avec une infinie délicatesse. J'ai par ailleurs été très flattée d'être au coeur des ces confidences qui m'ont aidé moi aussi à considérer la Chine autrement. Florence TOUZET

1 commentaire:

Cali a dit…

J'avais lancé l'idée à Noël il y a quelques années, de faire un cadeau à chacun de moins de 50 Francs. J'ai eu pour ma part deux livres, dont "vent d'est, vent d'ouest". Et j'ai découvert Pearl Buck. Elle est fantastique. Elle écrit merveilleusement bien, c'est sain, doux, elle donne envie de se blottir... Un merveilleux moment. Et depuis, j'en ai lue d'autres bien sûr (Pivoine, le pavillon des femmes, la mère).

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