samedi 8 mai 2010

Les cendres d'Angela de Frank McCourt

Originaire de Limerick en Irlande du sud, peu aimée par sa mère, Angela est envoyée en Amérique. Elle rencontre Malachy McCourt, lui aussi irlandais mais d’un comté du nord, dont  le patriotisme un peu trop virulent l’a obligé à s’exiler. Sous la pression familiale, Malachy épouse Angela enceinte. Franck nait quelques mois plus tard, d’autres enfants suivent. Mais la situation déjà précaire se dégrade, et lorsque Frank a 4 ans, la famille quitte New-York et revient s’installer en Irlande. Nous sommes au début des années 30, en pleine récession. A cette époque, la misère y est dramatique dans les grandes villes, le « racisme » entre le nord et le sud omniprésent, la religion pesante, les maîtres d’école violents avec les élèves. Le père part tenter sa chance en Angleterre, ce qui empire encore la situation d’Angela et de ses enfants laissés sans ressources sur place. Au milieu de tout cela, Frank survit comme il peut…
Ce récit, au million de lecteurs et récompensé du prix Pulitzer, est autobiographique et expose les souvenirs de 4 à 19 ans de l’auteur. C’est absolument terrible et insupportable dans les faits. Mais Frank McCourt  a choisi de raconter son histoire avec les mots et la sensibilité de l’enfant puis de l’adolescent qu’il était alors, et qui ne perçoit pas son quotidien dramatique comme noir en permanence (d’autant plus qu’il ne comprend pas tout). La façon dont il interprète certaines situations et son aveuglement même parfois en deviennent  presque drôles. Ses petits arrangements avec la religion, notamment lors de ses premiers émois « hormonaux », sont un pur bonheur pour le lecteur. Cette spontanéité et naïveté apporte une bouffée d’oxygène au milieu d’un récit qui aurait pu sombrer dans le glauque à force d’accumulation. Ce livre compte un peu plus de 500 pages et les chapitres sont longs. Mais l’auteur sait tenir en haleine par son choix littéraire, et ainsi ne pas lasser le lecteur.
J’ai été absolument captivée par ce livre. Un pédopsychiatre serait affolé si on lui soumettait aujourd’hui ce cas. Et pourtant Frank garde toute sa fraicheur et il fait avec comme il peut au quotidien, sans se poser de question sur sa situation ni en vouloir à qui que ce soit. Nos enfants sont trop jeunes pour lire ce livre, nos adolescents peuvent être rebutés par son épaisseur, mais ce serait une bonne leçon à  leur apporter lorsqu’ils se plaignent de petits tracas tellement futiles à côté de ce qui se passaient  il n’y a même pas un siècle en Irlande. On ne peut non plus s’empêcher de comparer et de se rendre compte à quel point le confort et la sécurité dont bénéficient la plupart de nos enfants les rendent moins débrouillards !

Sophie HERAULT

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