vendredi 7 septembre 2007

La lumière des justes de Henri Troyat

Les compagnons du coquelicot, La barynia, La gloire des vaincus, Les dames de Sibérie, Sophie ou la fin des combats.
Une fois tournée la dernière page du cinquième tome de cette saga, on ressent un grand vide. Déjà fini? Il me semble avoir lu la première ligne hier. Si Troyat a choisi de faire revivre, à travers cette histoire mouvementée le destin des Décembristes, il n'a pas résisté au plaisir d'y inclure deux personnages fictifs, Sophie et Nicolas dont le destin à tout jamais lié par l'amour va nourrir cette épopée.
Habitée par les idées de la toute récente révolution française, Sophie, le coeur enflammé par un Nicolas bouillant, impétueux et juvénile va se trouver confrontée à la dure réalité du régime russe et à la machine implacable avec laquelle il imprime sa puissance sur l'ensemble du peuple. La force et la personnalité du tsar galvanise les sujets aristocrates et écrase sous un joug féroce, par l'intermédiaire de ces mêmes individus propriétaires terriens, la population laborieuse des Moujiks. Auprès d'un certain nombre d'intellectuels de la haute société russe déjà sensibilisés,Sophie va jouer le rôle d'élément déclenchant d'une tentative de coup d'état qui tournera au drame en décembre 1825. Elle décidera alors de suivre l'amour de sa vie jusqu'au bout du monde, au bagne de Sibérie.Elle le retrouvera au terme d'un voyage interminable, exténuant mais sublime à travers des paysages de rêve et des épreuves de cauchemar. Comme elle, nous sentons les flocons glacés nous piquer le visage et l'on reste bouche bée devant les cristaux de givre bleus suspendus à une branche, renvoyant les premiers rayons du soleil du matin. Comme elle nous nous insurgeons contre les tracasseries sordides et incessantes de la bureaucratie dans ce régime totalitaire. Destin auquel on aurait peine à croire si ces êtres n'avaient réellement existé, l'esprit libre, les fers aux pieds. De nombreux personnages jalonnent les pages de cette histoire de vie. Certains révoltants dans leur cynisme ou leur lâcheté, certains touchant dans leur grâce ou dans leur complexité, d'autres superbes dans leurs illusions souvent déçues. Quant à nous, c'est dans l'âme de Sophie et de Nicolas que nous voyageons. Nous vivons avec passion leurs déchirures, leurs espoirs, et nous explorons les méandres des réflexions que suscite la dualité entre les idées philosophiques et la réalité du vécu des êtres: est-il possible de faire le bonheur des autres sans leur adhésion? Merveilleux Troyat aux yeux duquel tous les humains trouvent grace.Chaque mot méticuleusement choisi sonne juste, comme le seul possible, pour nous transporter avec force et précision dans son imaginaire. Tout cela est puissant,bouleversant. A partager l'intimité de leur coeur, Nicolas et Sophie sont devenus mes amis. Ils vont maintenant rejoindre les héros de roman de mon panthéon personnel et y occuper la place qu'ils méritent. Florence TOUZET

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