lundi 7 décembre 2009

Gouttière de Remo Forlani

Elle s'appelle Lucie, elle est Parisienne. Son Homme, Vincent, l'a abandonnée pour une fille "qui a l'âge d'être sa fille". La voilà à la rue. L'occasion pour elle de se remémorer sa vie, ses hauts et ses bas, comment elle en est arrivée là. Ah, oui : Lucie, la narratrice de ce récit, c'est une chatte. Une chatte de gouttière, avec 4 socquettes blanches et un pelage de toutes les couleurs. A l'image de sa vie, car elle en a vu de vertes et de pas mûres, depuis le jour où elle a été la seule rescapée du sac poubelle destinée à l'étouffement de toutes sa portée...

Ce roman plaira inconditionnellement aux amoureux des chats. Quant aux autres, ils regarderont certainement les félins d'une autre manière après la lecture de ce livre. Lucie est féline jusqu'au bout des griffes : Tantôt sauvage tantôt câline, élégante, dédaigneuse, capricieuse, souvent névrosée... Toujours très vraie, très "chat", le lecteur y reconnaîtra tour à tour chacun des chats qu'il a connus, à travers ses différents mimiques et attitudes. Les maîtres successifs de Lucie sont très bien croqués eux aussi : la grande dame horrifiée qui ne veut pas garder les chatons "gouttière" de sa chatte de grand prix, les mères-à-chat infatigables, la bonne âme dont la maison déborde d'animaux abandonnés, les bourgeois ennuyeux qui veulent un chat de salon, les passionnés... Aucun n'échappe à la plume aiguisée de l'auteur. D'autant que ces humains sont vus à travers les yeux de Lucie, qui, étant chatte, voit bien sûr les choses à sa façon...

Lucie n'a pas la langue dans sa poche quand elle écrit, on obtient ainsi une description parfaite de sa découverte du monde (principalement citadin), ses amours et amitiés, ses moments de joie ou de peine... Le style est très direct : toujours simple, parfois familier, que ce soit dans le vocabulaire employé ou la syntaxe utilisée (après tout, c'est une chatte qui raconte !) ; pas de phrases tarabiscotées, au contraire les phrases sont courtes, très courtes, très souvent même sans verbe, appuyant ainsi une pensée forte de Lucie. La chatte se raconte sa vie à elle-même, mais le tout est tellement vivant, entrecoupé de petites onomatopées félines, ponctué de petites réflexions piquantes d'incompréhension animale ou d'interrogation existentielle, que l'on jurerait que le récit nous est adressé directement.
On rit, on pleure, tant c'est triste et amusant à la fois. C'est beau, c'est tendre, c'est émouvant, un pur moment de bonheur de lecture !

Marie-Soleil WIENIN

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