vendredi 25 décembre 2009

Les trois roses jaunes de Raymond Carver


Comme tous les ouvrages en prose de Raymond Carver, Les trois roses jaunes est un recueil de nouvelles. Précisément sept nouvelles s’enchaînent ici, où l’auteur avec son art habituel nous conte les histoires de gens simples. Car les personnages de Raymond Carver ne sont jamais des héros. Ils travaillent parfois à l’usine, parfois ailleurs, on sait rarement où, et quand leur profession est intellectuelle, il nous semble pourtant très proche de nous. Ils ne font jamais rien d‘extraordinaire, ils vivent et c’est déjà beaucoup.
Dans Cartons, un homme essaye de refaire sa vie avec une nouvelle compagne malgré une mère qui l’encombre et le culpabilise. Dans Débranchés, chaque nuit une femme rêve, elle raconte ses rêves à son mari qui en est pourtant exclu. Il ne dit rien, mais ça l’énerve. Dans une autre nouvelle, un homme s’est laissé aller à une relation adultère sans en mesurer les conséquences, il est pétrifié, sidéré de se retrouver dans cette situation.
Les nouvelles sont souvent racontées à la première personne du singulier, depuis le point de vue du personnage principal. Elles sont pourtant émaillées de dialogues. Cette conjugaison de moyens évitent les platitudes des monologues intérieurs, elle rend la narration très vivante. Le lecteur se retrouve vite au cœur de la situation, pris dans les mêmes doutes et les mêmes interrogations que l’homme dont il lit l’histoire.
Raymond Carver raconte non pas des destins mais la succession, l’enchaînement de petits faits qui n’ont d’autre sens que celui qu’on veut bien leur donner. Il raconte comme parfois l’homme ne comprend rien à sa vie, comment l’insatisfaction le ronge et les responsabilités l’écrasent. Avec une économie de moyens littéraires assez époustouflants, il fait entrer le lecteur dans l’intimité de ces hommes et de ces femmes. Et c’est là la plus belle réussite de l’auteur, la proximité que ses personnages partagent avec le lecteur. Raymond Carver est un virtuose, chaque nouvelle est une réussite de sobriété qu’une écriture unique nous révèle. Avec ce qui semble être presque rien, il nous fait partager la part la plus secrète et la plus inavouable de notre humanité.

Jacky GLOAGEN

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